La Syrie, cas d'école de l'impuissance des grandes puissances occidentales à dicter l'ordre du monde, selon Hubert Védrine. "On n'a plus les moyens de nos émotions, de les traduire en actes", observe l'ancien ministre des Affaires étrangères, invité du Club de la presse lundi. "Il y a un écart horriblement cruel entre ce que nous pensons, ressentons, et ce qu'on peut faire en vrai", explique l'ancien ministre du gouvernement Jospin, pour qui "la preuve est faite qu'on n'a pas réussi à faire tomber Assad".
Pour démêler "un cas très compliqué", il va donc falloir se tourner selon Hubert Védrine vers le régime syrien, soutenu par son allié russe et aujourd'hui engagé dans une offensive meurtrière sur la ville d'Alep. "C'est incroyablement cruel, il y a des centaines de milliers de morts", reconnaît l'ancien diplomate. "C'est un crève-cœur de se dire qu'on va faire avec Assad. Les opinions publiques occidentales n'arrivent pas à franchir ce pas."
La guerre, et après ? Devant cette impasse, "la France vit encore dans l'idée que si Obama n'avait pas stoppé les bombardements (en 2013, après l'emploi d'armes chimiques par le régime), les rebelles démocrates seraient au pouvoir, il n'y aurait pas à choisir entre la peste et le choléra." Une analyse que récusent le président américain et Hubert Védrine. "En réalité, les Russes ont les clefs", assure l'ancien ministre des Affaires étrangères. "Les politiques occidentales ont échoué."
La situation en Irak, où la coalition internationale soutenue par le gouvernement de Bagdad va bientôt lancer un assaut sur Mossoul, est "plus simple". "Il est évident qu'à la longue, la coalition ad hoc, pour éliminer Daech, va y arriver. Mossoul va être reprise, puis Raqqa, où il y a les quartiers généraux des djihadismes francophone et russophone", prédit Hubert Védrine. Mais, en Syrie comme en Irak, il restera cette question après les combats : "Quel Irak après ? Et quelle Syrie ?"