La conversation en ligne à propos du petit écran a le vent en poupe sur Twitter et Facebook. Mais quel réseau social présente le plus d'avantages pour les chaînes ?
Commenter les déclarations d'une personnalité politique lors d'une émission, la prestation d'un candidat à un télé-crochet ou le rebondissement d'une série, ça se fait de plus en plus sur les réseaux sociaux. La pratique a un nom : la "social TV". Ce terme désigne la conversation qui se développe en ligne à propos de ce qui se passe sur le petit écran. Une activité qui intéresse de plus en plus les chaînes. Et dans laquelle se dessine un affrontement entre deux acteurs majeurs : Twitter et Facebook…
• Combien de Français pratiquent la social TV ?
Selon une étude publiée début octobre par l'institut de mesure d'audience Médiamétrie, 7,2 millions d'internautes ont déjà posté en ligne un commentaire sur un programme TV, soit un internaute sur cinq. L'analyse des réactions postées sur Twitter montre que le phénomène est en croissance rapide : "800.000 personnes ont commenté au moins un programme TV en mai 2013, soit 2,3 fois plus qu'en septembre 2012", affirme l'étude. La social TV s'affirme comme une activité de "jeunes adultes" : près d'un tiers des internautes qui la pratiquent ont entre 15 et 34 ans.
• Quels sont les programmes qui suscitent le plus de réactions en ligne ?
"Les émissions qui génèrent le plus d'interactions sont l'information politique, le sport et le divertissement évènementiel", explique à Europe1.fr Antonio Grigolini, responsable de la social TV chez France Télévisions, qui cite notamment des émissions de débat comme Des paroles et des actes ou Mots croisés sur France 2. Pour l'instant, le record toutes catégories confondues remonte à janvier dernier : les NRJ Music Awards, sur TF1, avaient suscité 1,45 million de tweets en une soirée ! A l'inverse, les fictions et les documentaires suscitent beaucoup moins de réactions en temps réel. "Ce type d'émission demande un certain niveau d'immersion dans l'œuvre, si bien que vous n'avez pas tellement envie de la commenter pendant, mais plutôt après", justifie Antonio Grigolini. "C'est aussi une question d'état d'esprit, qui n'est pas le même selon qu'on regarde un film ou une émission politique."
• Pourquoi Twitter a-t-il été précurseur sur la social TV ?
Incontestablement, Twitter s'est affirmé comme une bruyante caisse de résonance numérique des programmes télévisés. "Cela s'explique par la nature même de Twitter, où les contenus sont publics et valorisent le temps réel", explique Sébastien Lefebvre, fondateur de la société Mesagraph, spécialisée dans l'analyse des médias sociaux. "Cet aspect ouvert permet de mesurer l'audience sociale". Mais les réactions sur Twitter traduisent-elles vraiment ce que pensent l'ensemble des téléspectateurs d'un programme ? "Ce que l'on mesure sur Twitter reflète la structure de l'audience TV réelle", assure Sébastien Lefebvre. La raison : si Twitter était auparavant trusté par un public restreint, "c'est de moins en moins le cas. Le nombre de "twittos" en France a été multiplié par deux et demi en un an", rappelle-t-il. Si bien que le public qui tweete est de plus en plus représentatif de celui qui est présent devant le petit écran.
• Facebook va-t-il rattraper son retard?
Face à l'avance prise par Twitter, facilitée par l'aspect public de ses contenus, Facebook ne compte pas rater le coche. La semaine dernière, le réseau social a annoncé avoir conclu un partenariat avec TF1 et Canal+, afin que ces chaînes accèdent à des données sur les commentaires postés publiquement à propos de leurs programmes. "C'est une première étape", a assuré Laurent Solly (photo), patron de Facebook France, dans une interview à Stratégies. Rappelant "qu'il y a 18 millions de Français chaque jour sur Facebook", Laurent Solly affirme que "la plateforme leader autour de la télé et qui peut nourrir plus conversations et plus de données, c'est Facebook". Il s'appuie pour cela sur un sondage Orange-Terrafemina de juillet, selon lequel 52% des interactions en ligne avec les programmes TV ont lieu sur Facebook, contre 11% sur Twitter.
• Finalement, les chaînes vont-elles préférer Twitter ou Facebook?
Si Facebook, fort de ses très nombreux utilisateurs, présente un grand potentiel, son caractère privé risque de constituer un handicap pour investir la social TV. "Sur Twitter, la conversation est d'emblée publique, alors que sur Facebook, il s'agit d'une conversation entre amis", résume Antonio Grigolini, de France Télévisions. Cet aspect "fermé" empêche l'exploitation par les chaînes de la plupart des commentaires postés. Cependant, Facebook présente d'autres intérêts sur un temps plus long. "Twitter est l'outil d'interactivité par excellence pour l'évènementiel et l'instantané, mais Facebook peut permettre de développer une communauté au fil du temps, comme l'a fait Canal+ pour la série Bref il y a deux ans", détaille Sébastien Lefebvre. Les chaînes devront donc apprendre à jongler avec les deux réseaux. "Ce qui est important, c'est d'être là où sont les gens", conclut Antonio Grigolini, pragmatique.