Il s'en va. "J'ai décidé de démissionner de ma fonction de directeur et de quitter Libération", annonce Nicolas Demorand, jeudi dans une interview au Monde. La majorité des salariés demandait depuis novembre le départ du directeur de la publication du titre, sur fond de chute des ventes et de crise de confiance entre journalistes et actionnaires.
"Une crise ouverte". "Ma décision est d'abord dictée par la situation de ces derniers jours. Libération vit désormais une crise ouverte, je cristallise une partie des débats et j'estime qu'il est de ma responsabilité de patron de redonner des marges de manœuvre et de négociation aux différentes parties", estime Nicolas Demorand. "J'espère que mon départ permettra aux uns et aux autres de retrouver la voie du dialogue".
"Une situation de blocage". "Ma décision résulte d'une divergence stratégique profonde", ajoute le journaliste, qui estime que "Libération est encore une entreprise dominée par le papier". "Depuis trois ans, mon projet a été de faire prendre à l'entreprise le virage numérique et de transformer en profondeur notre manière de travailler", mais "on est dans une situation de blocage", explique-t-il. "Sur Internet, la rédaction papier ne produit en moyenne que 0,1 article par semaine et par journaliste pour le site", dénonce-t-il.
"J'ai fait ce que j'ai pu". Nicolas Demorand assure n'avoir pas de regrets. "Être patron de Libé, c'est passer son temps à chercher de l'argent", affirme-t-il. "J'ai fait ce que j'ai pu avec les moyens que j'avais", souligne-t-il, invoquant "un sous-investissement chronique" et un "conflit" entre "des cultures professionnelles et des pratiques du journalisme tel qu'il doit être aujourd'hui".
Une chute des ventes.Libération, dont la diffusion France payée a chuté de 15% en 2013, est en crise ouverte depuis la présentation par les actionnaires d'un projet destiné à diversifier les activités autour du journal. Un plan rejeté par les salariés, qui consacrent chaque jour, depuis lundi, deux pages du journal au conflit entre journalistes, actionnaires et dirigeants. Reste à savoir si le départ de Demorand permettra un déblocage de la situation. Une assemblée générale était prévue jeudi à midi et de nouvelles discussions avec les actionnaires auront lieu la semaine prochaine, indique une source en interne à Europe1.fr.
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