L'INFO. Mediapart, le site d'information qui a notamment révélé les affaires Cahuzac et Bettencourt, a reçu mardi par huissier un avis de contrôle fiscal, visant la TVA réduite qu'il applique à ses abonnements. "Une attaque à la presse en ligne", s'indigne la rédaction du site, qui s'interroge sur un éventuel lien avec ses révélations gênantes pour le gouvernement.
Pourquoi ce contrôle ? Le contrôle prévu par le fisc, qui commencera vendredi, vise le taux de TVA appliqué par Mediapart. Le site a en effet choisi de n'appliquer qu'une TVA de 2,1% sur ses abonnements, en s'appuyant sur le fait que la presse imprimée bénéficie de ce taux réduit. L'administration fiscale, pour sa part, considère que Mediapart devrait appliquer le taux standard de 19,6%.
Un serpent de mer. Cette divergence quant au taux de TVA applicable à la presse en ligne est un serpent de mer depuis plusieurs années. D'autres "pure players", des sites d'information non adossés à un média traditionnel, font en effet de la résistance aux règles fiscales en appliquant une TVA à 2,1%. C'est par exemple le cas d'Arrêt sur images, le site sur les médias fondé par Daniel Schneidermann en 2007, ou d'Indigo Publications, un groupe éditeur de lettres confidentielles, qui a également reçu une notification de contrôle fiscal mardi.
"Incompréhensible". "Nous ne sommes pas les seuls visés, il s'agit d'attaque frontale contre l'ensemble de la presse en ligne", s'indigne François Bonnet, le directeur éditorial de Mediapart, joint par Europe1.fr. "C'est d'autant plus incompréhensible que depuis plusieurs années, les déclarations de tous les partis politiques et l'ensemble des rapports sur le sujet appellent à harmoniser la TVA de la presse numérique et papier", assure-t-il. Mediapart s'appuie également sur un arrêt rendu en 2011 par la Cour de justice européenne, selon lequel "des prestations de services semblables" ne peuvent être "traitées de manière différente du point de vue de la TVA".
"Bercy voudrait-il se venger ?" Chez Mediapart, on s'interroge ouvertement sur un éventuel lien entre ce contrôle et la révélation par Mediapart de l'existence d'un compte en Suisse détenu par Jérôme Cahuzac (photo). "Un an après le déclenchement de l’affaire Cahuzac, qui a conduit à la démission d’un ministre du budget fraudeur que soutenait sa haute administration, Bercy voudrait-il se venger à froid d’une presse trop indépendante ?", lâche Edwy Plenel, le fondateur de Mediapart, dans une tribune mise en ligne mardi.
"Nous avons des informations selon lesquelles cette offensives a été décidée au sein de la haute administration de Bercy", explique François Bonnet. "Or, cette administration a été durement mise en cause par la commission d'enquête sur l'affaire Cahuzac. On peut donc se demander s'il y a une volonté de règlement de comptes".