7.000 pour les uns, 100.000 pour les autres... La polémique fait rage sur le nombre de participants à la manifestation de Jean-Luc Mélenchon pour une "révolution fiscale", dimanche. En tout cas, certains d'entre eux sont arrivés en avance, puisqu'ils ont servi de décor à une interview du leader du Front de gauche, dans le journal de 13 heures de TF1, présenté par Claire Chazal… La mise en scène "sera examinée à la prochaine réunion du groupe de travail Déontologie", a d'ores et déjà fait savoir le CSA, contacté par Europe1.fr.
Une photo postée sur Twitter. Cette interview a été réalisée en direct dans l'avenue des Gobelins à Paris vers 13h05, un peu avant le début de la manifestation, prévue à 13h30. Juste au moment de l'interview, le journaliste hollandais Stefan de Vries, qui habite au-dessus de cette avenue, a pris la scène en photo depuis son balcon et a posté cette image sur Twitter.
Petite mise en scène médiatique de @JLMelenchon. A la télé et en réalité... http://t.co/WpMeM2kY7ohttp://t.co/4YLY6tcY2K— Stefan de Vries (@stefandevries) December 1, 2013
On y voit Jean-Luc Mélenchon en train d'être interviewé et, derrière lui, quelques dizaines de manifestants réunis en un carré compact, mais personne autour. Ce qui est logique puisque non seulement la manifestation n'a pas encore commencé, mais elle est prévue 150 mètres plus loin…
Une scène qui contraste avec ce que l'on voit à l'antenne dans le JT de TF1, qui donne l'impression d'une foule nombreuse déjà rassemblée derrière Jean-Luc Mélenchon. "On aperçoit derrière vous les drapeaux et les gens qui se massent", remarque d'ailleurs Claire Chazal au moment de commencer l'interview.
Pour info: le crédit de ces images, prises au même moment, m'appartient. cc @JLMelenchon#intoxpic.twitter.com/EYTv57b2EQ— Stefan de Vries (@stefandevries) December 1, 2013
"C'était clairement une mise en scène". "J'étais chez moi, avenue des Gobelins, juste au dessus de l'endroit où se faisait l'interview", a raconté à l'AFP Stefan de Vries, correspondant en France de RTL Pays-Bas et chroniqueur pour France 24 et La Croix.
"J'ai été surpris de voir des manifestants arriver là alors que la manifestation commençait plus loin, place d'Italie, à environ 150 mètres. Puis j'ai vu que Mélenchon arrivait, c'était clairement une mise en scène, c'était flagrant. En plus ils ont utilisé un zoom, ce qui donne l'impression que Mélenchon est entouré d'une énorme foule, alors qu'il s'agissait de 20 à 30 personnes".
>> Regardez l'interview de Jean-Luc Mélenchon sur TF1 :
"Quand j'ai vu qu'on faisait une interview avec des caméras, j'ai zappé sur la télé et j'ai vu que c'était en direct sur TF1. Alors j'ai pris la photo depuis mon balcon, puis j'ai photographié l'écran de ma télé. Il y a une différence d'environ 10 secondes entre les deux clichés", a-t-il expliqué. "Après l'interview, les manifestants sont partis".
"Mais je ne veux pas dire qu'il n'y avait personne à la manif", a-t-il nuancé. "Ils ont juste orchestré ça pour le direct et délocalisé la manif", a-t-il ajouté.
Une nouvelle polémique pour l'info de TF1. Interrogée par l'AFP, TF1 n'a pas fait de commentaires. Il faut dire que c'est la seconde fois en un mois que le JT de la Une se fait épingler. Vendredi, TF1 a été "mise en demeure" par le CSA pour manquement à ses obligations déontologiques. Motif : la chaîné a décalé un son dans un reportage sur la visite de François Hollande à Oyonnax, le 11 novembre, laissant croire que le chef de l'Etat avait été conspué par une foule au moment de sortir de sa voiture, ce qui n'était pas le cas.
"Donner une dimension militante aux images". Du côté du Front de gauche, on estime que ces clichés ont été montés en épingle. "C'est une opération qui vise à nous nuire", a estimé Alexis Corbière, conseiller de Paris et secrétaire national du Parti de gauche, interrogé par Le Huffington Post. Il admet tout de même que des consignes ont été données : "Pour présenter une manifestation, on n'allait pas faire l'interview dans une rue déserte. Il est donc logique d'avoir voulu donner une dimension militante aux images".
"Il n'y a jamais eu d'intention de faire croire qu'il y a avait du monde, ni de notre part ni de celle de TF1", complète une proche conseillère de Jean-Luc Mélenchon, citée anonymement par le site. "Seulement pour un duplex censé illustrer une manifestation, il nous semblait plus sympa qu'il y ait des militants derrière pour faire une belle image en situation".