Ses débuts, ses remords : Christophe Hondelatte raconte la genèse de Faites entrer l'accusé

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Baptiste Denis , modifié à

Le programme de France 2, Faites entrer l'accusé, célèbre ses 20 ans cette année. L'occasion pour Christophe Hondelatte, son présentateur mythique, de raconter comment cette émission de faits divers est née pour ensuite devenir une référence, dans Hondelatte raconte ce jeudi de 14 à 15h.

C’était il y a 20 ans, le 6 juin 2000. La première diffusion de l’émission Histoire de… sur France 2, qui deviendra ensuite le célèbre Faites entrer l’accusé est lancée. À la présentation à l’époque, un journaliste qui n’aimait pas vraiment encore les faits divers : Christophe Hondelatte. Mais de la plus mystérieuse à la plus sordide, il a raconté pas loin de 150 affaires dans un décor de théâtre et tissé au fil des années une véritable cote d'amour auprès des téléspectateurs.

>> Le journaliste a raconté sur Europe 1 son lien avec l’émission, dans Hondelatte raconte :

Rien, pourtant, ne prédestinait Christophe Hondelatte à présenter ce type d'émission. 12 ans avant le lancement du programme, le Bayonnais travaille pour la Radio Berri Sud à Châteauroux et découvre pour la première fois les faits divers. "Je trouvais ça absolument immoral d’aller interviewer des gens dans le malheur. Je trouvais que c’était aller chercher la larme de manière extrêmement voyeuse et je ne voulais pas être de ce journalisme là", se souvient Hondelatte dans le Culture médias de Philippe Vandel.

"J'avais envie que l'on voie ma tronche à la télé"

En 1999, alors qu'il présente le journal sur France Inter et qu'il anime une émission sur Forum Planète, il est contacté par la directrice des programmes de France 2, qui lui propose d'animer une nouvelle émission. "France 2, ça ne se refuse pas", relate-t-il. "J’avais 36 ans et l'envie que l’on voie ma tronche à la télé. La vanité sans doute, un besoin de reconnaissance, le sentiment que ce serait un aboutissement. Bref des conneries…"

La machine est en marche dès l'année 2000 : France 2 lance Histoire de..., un programme destiné aux faits divers avec une présentation innovante : "L’idée d’avoir un présentateur dans un documentaire n’avait encore jamais existé en France. Aujourd’hui, avec Échappée Belle, La Maison France 5, toutes ces émissions sont incarnées par un présentateur. On a inventé un type d’émission et c’est ce qui nous a sauvé et c’est pour cela qu’elle existe encore."

" Le réalisateur était tendu comme un cheval. Avait-il misé sur le bon cheval ? "

Souvent dans un bureau de policier ou au comptoir d'un bar, Christophe Hondelatte s'affirme et invente son propre style avec des introductions toujours savoureuses. "On a mis du temps à s’imprégner du décor. Les tournages dehors prenaient un temps fou. Il y avait souvent une forme d’inconfort qui faisait que l’on terminait toujours à trois heures du matin", se remémore-t-il avant de dresser un autoportrait sur son premier passage. "Je n’ai aucun souvenir de ce premier plateau. J’ai dû être très mauvais. On n'avait pas de prompteur bien sur. Après j’ai demandé que l’on m’en mette un, mais au début je devais apprendre mes textes par cœur. Et bien sûr je ne les savais pas et j’ai dû recommencer et recommencer. Christian, le réalisateur était tendu comme un cheval. Avait-il misé sur le bon cheval ?"

Des années plus tard, la réponse n'a désormais plus de sens. Le présentateur prend goût pour les faits divers et les personnages qui les incarnent. "C’est le rapport avec les gens qui change le rapport à la matière. Ça n’arrive pas souvent, mais au cours de la deuxième saison, je rencontre une assassine, Simone Weber (cette femme de 55 ans accusée d’avoir empoisonné son amant, avant de découper son corps avec une meuleuse à béton). Je l’interviewe dans un grand hôtel à Cannes et c'est surréaliste, on ne comprenait rien. Ça partait dans tous les sens, c’était très drôle. Cette dame est une psychopathe, mais en même temps j’ai eu de la tendresse pour elle. Et cette capacité à s’attacher à elle m’a amené à penser que cet univers du crime était plus intéressant que je ne le pensais". 

"J'ai condamné des types à la perpétuité réelle"

Une réussite qui a ses revers et qui va même jusqu'à gêner le journaliste. Les répercutions de Faites entrer l'accusé étant souvent trop durs à supporter pour les assassins. "J’ai failli arrêter bien avant que j'arrête définitivement en 2011. J’ai beaucoup de mal avec cette double peine que pouvait mettre en place cette émission puisqu'elle était très regardée dans les prisons. Les détenus mentent sur leur passé et d’un coup tout est divulgué à tout le monde à la télévision. Lorsqu’ils sortent de prison, tout le monde leur dit qu’ils connaissent leur histoire. Quand je revois des Faites entrer l’accusé, je me dis que j’ai condamné des types à la perpétuité réelle. C’est troublant."

Une morale qui ne l'empêche pas de continuer à raconter de nouveaux faits divers chaque jour au micro d'Europe 1 dans son émission Hondelatte raconte, qui sera consacrera  ce jeudi à son lien si particulier à Faites entré l'accusé.