Nos voisins helvètes se rendront aux urnes dimanche. Les Suisses sont en effet invités à se prononcer sur le maintien, ou non, de leur redevance audiovisuelle. Baptisée "No Billag", du nom de l'entreprise chargée de collecter la redevance, cette initiative populaire fédérale risque de signer la fin de la radio et de la télévision publique suisse (TSR), mais pourrait également avoir des répercussions sur les programmes télé des francophones.
Fin des financements. "Billag n'a pas très bonne presse parce qu'elle avait autrefois des inspecteurs qui allaient chez les gens pour observer s'ils avaient un appareil de radio ou de télévision", raconte André Crettenand, ancien rédacteur en chef de l'actualité à la TSR au micro de Village médias sur Europe 1. "Les initiants [un groupe de libéraux, ndlr] ont eu la bonne idée de titrer leur initiative 'No Billag'. Donc c'est plutôt populaire et bien joué, mais ce qui se cache derrière le texte, c'est la suppression de toute redevance et de tout subventionnement de la part de l'Etat à l'audiovisuel public, alerte-t-il.
Le texte de l'initiative stipule en effet que l'Etat n'aura pas le droit de compenser la suppression de la redevance par un autre type de dotation, ce qui laisserait le marché aux mains de groupes privés, et principalement étrangers. "Il n'y a pas de groupe privé suisse qui aurait la capacité d'investir dans la télévision", relève André Crettenand. Pour ce journaliste, la victoire du 'oui' à la question : "êtes-vous favorable à la suppression des redevances radio et télévision ?", serait donc "une catastrophe". "Concrètement, cela signifie que la radio et la télévision suisse doivent fermer leur porte. Cela veut dire 6.000 emplois directs de touchés, mais l'on pense que 10.000 personnes peuvent perdre leur emploi", pointe André Crettenand.
TV5 Monde lourdement impacté. Mais les conséquences d'une telle décision pourraient également se faire sentir jusque dans les couloirs de France Télévisions, puisque la télévision publique suisse est propriétaire à plus de 11% de TV5 Monde (détenu à près de 50% par France Télévisions), premier réseau de chaînes francophones dans le monde et troisième réseau mondial après CNN et MTV. La disparition de la TSR signerait donc la fin d'un part non négligeable de son financement, soit 9 millions d'euros. "La radio télévision suisse est un contributeur important de TV5 Monde, non seulement du point de vue financier mais aussi du point de vue des programmes", insiste André Crettenand qui est précisément l'actuel directeur de l’information sur le réseau.
Malgré les risques, ce responsable se veut rassurant. "De manière générale, les Suisses sont très raisonnables", fait-il valoir. Ce que semble confirmer la dernière enquête d'opinion réalisée sur le sujet par l'audiovisuel public suisse, et selon laquelle 65% des votants refuseraient l'initiative "No Billag". Un avertissement néanmoins : "On n'est pas à l'abri d'une surprise, on l'a vu avec le Brexit", rappelle André Crettenand.