C'est l'une des plus grandes figures de la télévision française qui s'éteint. Jean-Pierre Pernaut est décédé mercredi soir à l'âge de 71 ans. Jeudi, dans Culture Médias, ses anciens collègues rendent hommage au journaliste, star du 13h pendant 33 ans, qui avait avant tout le monde porté la voix de la France des villages et du terroir. "Nous étions dans cette rédaction qui était une sorte de famille", se souvient sur Europe 1 la journaliste Claire Chazal. "Jean-Pierre était comme un père pour les journalistes, qui étaient souvent jeunes et en régions. Il les aidait beaucoup et il les écoutait."
Parmi ces jeunes journalistes, Thierry Thuillier, devenu depuis le directeur adjoint du pôle information du groupe TF1. "Mon premier souvenir avec Jean-Pierre est un souvenir de jeune journaliste, puisqu'il m'avait fait confiance sur mes premiers sujets. Quel soutien ! Quel mentor ! Quel pédago !", se réjouit-il. "Je retiens sa dimension très humaine. Lorsque vous entriez dans la rédaction du 13h, dans sa rédaction, vous deveniez son journaliste et il vous défendait bec et ongles."
Le style Jean-Pierre Pernaut, près du quotidien
Son ancien collègue se souvient aussi de la marque de Jean-Pierre Pernaut qu'il a installé dans son journal de 13h. "Il a créé, par son intuition et ses attaches en régions, un journal que personne n'avait pu imaginer. Parfois même contre la tendance générale", rappelle Thierry Thuillier. "C'était un remarquable journaliste qui ne se trompait que très rarement, peut-être jamais. L'édition spéciale au lendemain de la chute du mur de Berlin, celle du 11 septembre 2001, les interviews de présidents de la République et de Premier ministre... C'était un journaliste complet. Les Français lui faisaient confiance. Même après 30 ans, ses audiences étaient toujours à la hausse."
Robert Namias, ancien directeur adjoint chargé de l'information de TF1, précise que de son côté de Jean-Pierre Pernaut avait su redonner de l'élan à un journal de 13h en difficulté. "Jean-Pierre Pernaut avait succédé à un journal qui était —il faut bien le dire— totalement élitiste, celui d'Yves Mourousi, et dont les audiences étaient en berne. On a bien vu très vite que Jean-Pierre redressait les audiences", indique-t-il.
"Et, au bout d'une année, il avait largement dépassé le journal d'Yves Mourousi", poursuit-il. "Jean-Pierre était un provincial qui l'assumait et en portait les valeurs à l'écran de TF1. Ce qui n'existait sur pratiquement aucune chaîne de télévision."
Un amour mutuel et jamais démenti avec les Français
Ce "style Jean-Pierre Pernaut" avait en effet séduit les Français. Et ce succès ne s'était jamais démenti. "Je suis frappé par les audiences d'hier soir. Rendez-vous compte : une émission hommage à un journaliste de télévision qui a fait 6,5 millions de téléspectateurs !", s'exclame Robert Namias sur Europe 1. "Pendant longtemps, un Français sur deux écoutait Jean-Pierre Pernaut tous les jours !"
"Il a eu une vraie rencontre, qui n'était pas seulement télévisuelle, mais aussi politique", estime-t-il. C'est sans doute celui qui a le plus senti ce qui se disait dans ce qu'il appelait avec fierté 'la Province' et les régions', et qui a explosé à travers la crise des gilets jaunes."
"Il était à l'antenne comme il était dans la vie"
Claire Chazal retient également la spontanéité de Jean-Pierre Pernaut :"Il n'avait pas de prompteur, contrairement à moi ou à Patrick Poivre d'Arvor", relate la journaliste. "Ses lancements étaient courts, naturels, et plus directs que les nôtres."
Une analyse que rejoint Jacques Expert, qui a été pendant cinq ans le rédacteur en chef de l'émission Combien ça coûte ?, présenté par Jean-Pierre Pernaut. "Il était à l'antenne comme il était dans la vie. Cela semble facile à dire aujourd'hui, mais c'est la vérité. Il aimait la vie ordinaire et le quotidien", explique-t-il. "Et il y avait une chose qui le passionnait particulièrement : l'argent public gaspillé. Cela pouvait le mettre en pétard !" L'héritage de Jean-Pierre Pernaut se retrouve d'ores et déjà dans les JT des autres chaînes.