Coup de sang irrépressible ou calcul politique ? Mardi matin, c'est dans une ambiance très tendue que le domicile de Jean-Luc Mélenchon et le siège de La France Insoumise ont été perquisitionnés, dans le cadre de deux enquêtes préliminaires. Des perquisitions qui ont donné lieu à des accrochages avec la police et des magistrats, filmés par une télévision, mais également par Jean-Luc Mélenchon lui-même, et postés sur son compte Facebook. Après ces incidents, le parquet de Paris a ouvert une enquête pour "menaces" et "violences" sur les enquêteurs.
Le "parler dru et cru" du député LFI. Pour Stéphane Alliès, journaliste à Mediapart et co-auteur, avec Lilian Alemagna, d'une biographie en 2012 sur Jean-Luc Mélenchon, Mélenchon, à la conquête du peuple (éd. Robert Laffont), la réaction du député LFI se situe à la fois entre le calcul politique et la réaction spontanée. "Il fait à la fois montre d’un grand savoir faire planificateur, il pense toujours ses stratégies en étapes, mais en même temps, il se laisse parfois emporter par son hybris (sentiment de passion et de démesure, ndlr) et qui fait parfois déraper ses éventuels plans", explique le journaliste. "Je ne pense pas qu'il avait planifié du tout une telle stratégie face à la justice, et qu'il s’est laissé emporter par l’événement, par la surprise […] Peut-être qu’il y avait une certaine panique à voir la justice s'intéresser de trop près à des comptes de campagne dont on ne sait pas encore tout", complète-t-il.
Stéphane Alliès évoque également un parler "dru et cru", de la part de l'Insoumis. "C'est ce qu'il dit et c'est sa manière de fonctionner : il faut avoir un certain comportement de matamore pour se faire entendre, pour être invité dans les médias", explique le journaliste qui ajoute que hors plateaux de télé, radio et autres interviews, Jean-Luc Mélenchon est quelqu'un de "très agréable". "Il pratiquement rarement le "off" et parle très sincèrement de sa stratégie politique", estime Stéphane Alliès.
Jean-Luc Mélenchon-Sophia Chikirou : "l'intérêt général prime sur la vie privée". Fallait-il néanmoins sortir l'information qui fait état de la nature de la relation entre Sophia Chikirou (responsable de la communication du candidat pour la présidentielle et propriétaire de la société Mediascop, ndlr) et Jean-Luc Mélenchon ? "Beaucoup disent que c’est un secret de polichinelle. Moi personnellement, je n’avais aucune certitude sur tout ça", reconnaît Stéphane Alliès. "C’est vrai qu’on l’a entendu, de longue date, (à travers) des témoignages, y compris dans le premier cercle, y compris de gens qui nous vouent aujourd’hui aux gémonies et qui nous disaient à quel point ça commençait à devenir un problème vu les affaires qui s’amoncelaient autour de Sophia Chikirou", poursuit-il.
"Là, l’intérêt général prime sur la vie privée, ce n’est pas une nouveauté, ce n’est pas un traitement spécial réservé à Jean-Luc Mélenchon, en tout cas pas à Mediapart", ajoute le journaliste qui cite l'affaire Bettencourt ou encore la relation entre François Hollande et Julie Gayet que Mediapart avait contribué à révéler.