Liquidation de France-Antilles : "Ça a été brutal, personne n'y croyait"

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Céline Brégand

La Guadeloupe, la Martinique et la Guyane se retrouvent privés de quotidien local après la liquidation judiciaire du groupe France-Antilles jeudi 30 janvier. Caroline Bablin, la rédactrice en chef France-Antilles Guadeloupe et Emmanuel Poupard du SNJ reviennent sur cet événement dans "Culture Médias", sur Europe 1.

La liquidation judiciaire du groupe France-Antilles a été prononcée le jeudi 30 janvier par le tribunal de commerce de Fort-de-France, en Martinique. Trois départements français, la Guadeloupe, la Martinique et la Guyane se retrouvent donc sans quotidien local. 235 salariés sont au chômage et encore sous le choc. "Ça a été brutal même si nous avons vu les difficultés depuis des mois. Mais personne n'y croyait, c'était impossible", explique Caroline Bablin, la rédactrice en chef France-Antilles Guadeloupe, au micro d'Europe 1 mercredi. 

 "ll y avait une érosion des lecteurs constante depuis dix ans"

Si cette décision n'est pas une surprise - le groupe était en redressement judiciaire depuis le 25 juin 2019 et connaissait des pertes de 500.000 euros par mois - les journalistes pensaient que l'on finirait par trouver une solution. "On était plusieurs à accuser le coup après la décision du tribunal de commerce. On pensait que quelque chose allait être trouvé !" confie Emmanuel Poupard, premier secrétaire général du Syndicat National des Journalistes (SNJ) dans Culture Médias. 

Le groupe a été racheté il y a deux ans, et même si de gros investissements ont été faits, essentiellement sur deux rotatives, une pour la Martinique et une pour la Guadeloupe, "ça s'est avéré très compliqué. Ça a été une descente petit à petit", raconte Caroline Bablin. "ll y avait une érosion des lecteurs constante depuis dix ans", ajoute-t-elle. Et même si l'Etat avait injecté trois millions dans le groupe, 1,3 millions d'euros manquaient toujours. "J'ai vu Franck Riester, le ministre de la Culture, la semaine dernière et je lui ai demandé pourquoi l'Etat ne pouvait pas abonder davantage. Et la réponse est que ce n'était pas possible d'abonder plus qu'un pour un puisque sinon l'Union européenne tapait sur les doigts de la France", explique Emmanuel Poupard.  

"L'information n'est pas une marchandise"

Non seulement le quotidien papier disparaît, mais sa version numérique également. "Il n'y aura plus rien du tout, tout s'arrête alors qu'on était le premier site d'informations aux Antilles-Guyane", se désole Caroline Bablin, qui craint aussi que les archives numériques du journal disparaissent une fois que l'hébergement du site prendra fin. Une situation qui inspire "beaucoup de dégoût" à Emmanuel Poupard qui rappelle que "l'information n'est pas une marchandise". "Elle doit être libre et pluraliste et on ne peut pas se satisfaire de la disparition d'un journal", ajoute-t-il. 

Une dernière édition du quotidien, tirée à 55.000 exemplaires contre 20.000 habituellement, est parue samedi en Martinique et en Guadeloupe pour rendre hommage aux 55 ans de vie du journal, et pour dire au revoir aux lecteurs. Le numéro est en vente jusqu'à mercredi afin de soutenir financièrement les 235 salariés qui se retrouvent au chômage. Leur avenir reste flou même si un nouveau projet de quotidien serait à l'étude.