"Si à un moment, on n'a pas l'autorisation de distribuer beIN, si les pertes continuent, on sera obligé à un moment d'arrêter le robinet. Vivendi ne pourra apporter indéfiniment de l'argent à Canal+". Cette petite phrase est signée Vincent Bolloré, président du conseil de surveillance de Vivendi, devant les actionnaires lors de l'assemblée générale du groupe, jeudi dernier. La chaîne cryptée pourrait en effet accuser une perte opérationnelle de plus de 400 millions en 2016. Alors Canal+ est-elle vraiment en danger ? Dans Le grand direct des médias, les journalistes Caroline Bonacossa et Renaud Revel ont débattu sur la question.
Un timing bien choisi ? Pour Caroline Bonacossa, l'intervention de Vincent Bolloré, au sujet de Canal+, ne doit rien au hasard. "Pourquoi, en octobre dernier, Vincent Bolloré disait que Canal+ allait bien, alors que maintenant, la chaîne va mal ?", interroge la journaliste. Selon elle, la réponse est claire. "Il veut diffuser beIN sport et pour cela, il doit avoir l'aval de l'Autorité de la concurrence, (...) et si Canal + va mal, l'Autorité de la concurrence ne pourra pas s'opposer à cet accord", explique Caroline Bonacossa.
Crise de modèle ou mauvais effet Bolloré ? Pour Renaud Revel, la chaîne cryptée traverse de réelles difficultés. "Il y a une crise de modèle à Canal+. L'ancienne équipe dirigeante n'a pas anticipé l'avenir". Selon le journaliste, la chaîne fonctionne à partir d'un système vieillissant qui n'a pas su faire face aux plates-formes VOD et au streaming. "Si Canal+ n'opère pas le virage qu'elle doit faire, elle disparaîtra", présage Renaud Revel qui met en avant le prix d'un abonnement à Canal + (environ 30 euros/mois), comparé à celui de Netflix (moins de 10 euros/mois).
Selon Caroline Bonacossa, c'est d'abord la communication de Vincent Bolloré et ses choix stratégiques qui expliquent les difficultés actuelles de la chaîne. "Pour le premier semestre 2015, j'ai le chiffre de 50 millions de bénéfices", indique-t-elle, bien loin des 400 millions de pertes que pourrait connaître Canal+ en 2016. Pour la journaliste, la chute des abonnés (-218.000 en 2015) provient des modifications sur les programmes en clair et des grands mouvements opérés dans la direction de la chaîne. "Tout ce barouf n'est pas positif pour Canal+", estime Caroline Bonacossa, ce qui ne donne pas envie à des personnes de continuer à s'abonner.