La photo était très politique : il y a deux jours, Jean-Louis Borloo s'affichait, tout sourire, avec Nicolas Sarkozy dans la Somme. Mais la figure emblématique des centristes songe pourtant à s'émanciper du parti présidentiel et à poser ses propres jalons pour 2012.
Invité d'A vous de jugersur France 2, jeudi soir, jour de son 60e anniversaire, l'ancien ministre de l'Ecologie pourrait ainsi annoncer son départ de l'UMP, confirment plusieurs de ses proches. Officiellement, la décision doit être entérinée lors du congrès radical de mai, mais rien n'empêche jeudi Jean-Louis Borloo de devancer l'appel.
Une prise de distance progressive
Depuis le remaniement de novembre, où Nicolas Sarkozy lui a préféré François Fillon à Matignon, et son départ du gouvernement, ce poids lourd de la majorité a peu à peu pris ses distances avec l'UMP. Pour preuve, le 24 novembre dernier, il quittait la vice-présidence du parti majoritaire. En janvier, lors de ses voeux, il franchissait également un cap, jetant les bases d'une "confédération centriste".
Depuis, Jean-Louis Borloo participe chaque semaine aux réunions de travail de cette future formation avec, à ses côtés, Hervé Morin (Nouveau Centre), Jean Arthuis (Alliance centriste) et Jean-Marie Bockel (Gauche Moderne).
La confédération centriste en ordre de marche ?
Les statuts de la confédération, ses valeurs et son programme devraient être finalisés dans deux à trois semaines, selon un responsable. Lors de leur dernière réunion, les leaders centristes ont exprimé leur volonté d'accélérer et d'élargir leur mouvement pour proposer "une alternative aux Français".
Tous vivent mal la droitisation de la majorité, convaincus qu'elle aura bien besoin de ses deux pôles, la droite des ex-RPR et le centre "humaniste et social" des ex-UDF, pour l'emporter en 2012. L'ambiguïté de l'UMP vis-à-vis du FN lors des cantonales et l'utilisation "politicienne" de la laïcité, un thème qui leur est cher, a encore aggravé la fracture. "Nous voulons rendre audible le message de l'aile sociale de la majorité", explique le lieutenant de Borloo, Laurent Hénart. "En revanche, précise-t-il, pour nous il n’y a pas d’ambiguïté, on est toujours dans le cadre de l’alliance de la droite et du centre".
L'UMP s'inquiète
Nombre de centristes poussent cependant Jean-Louis Borloo à aller plus loin et à représenter leur sensibilité en 2012, une perspective redoutée par Nicolas Sarkozy, au plus bas dans les sondages. Le chef de l'Etat a d'ailleurs appelé son camp à resserrer les rangs et mis en garde ceux qui "voudraient mettre en cause l'unité de la famille".
La députée UMP Valérie Rosso-Debord a ainsi prévenu l'ancien ministre de l'Ecologie qu'il "porterait le poids" d'une éventuelle défaite de l'UMP s'il se présentait en 2012. Et le ministre de l'Intérieur, Claude Guéant de renchérir : "ce serait, pour les centristes, prendre un grand risque pour leurs idées et leur propre survie que de poursuivre une aventure solitaire", a-t-il insisté dans une interview donnée au Figaro Magazine. "A titre personnel, je pense qu'il est préférable que la droite ait un seul candidat dans un contexte où le centre se sentirait respecté", a ajouté l'ancien secrétaire général de l'Elysée.
Le meilleur d'entre-nous
Enfin, mercredi, ce fût au tour de Jean-François Copé de crier son amour aux centristes, en clamant : "l'UMP a besoin de Jean-Louis Borloo". Il a "une personnalité, une force, une créativité, un bilan hors du commun".
"Il a été le meilleur ministre de la Ville", a martelé le patron de l'UMP avant de conclure : "je souhaite de tout coeur que cette amitié personnelle contribue au-delà de l'amitié politique à ce que les radicaux demeurent au sein de l'UMP avec leur sensibilité et leur différence".