La polémique. C'est un véritable réquisitoire contre Berlin. Le Parti socialiste français a fustigé dans un document "l'intransigeance égoïste" de la chancelière allemande Angela Merkel, allant jusqu'à appeler à un "affrontement démocratique" avec l'Allemagne. François Hollande a relativisé le document et la direction du PS a elle-même décidé d'édulcorer ses attaques au vitriol contre Angela Merkel. A droite, ces mots durs ont provoqué un tollé. Retour sur une polémique en plusieurs temps.
"La chancelière de l'austérité". Dans un document de 21 pages, déposé vendredi et coordonné par le député Jean-Christophe Cambadélis, également vice-président du Parti socialiste européen, le PS s'alarme du fait que "le projet communautaire est aujourd'hui meurtri par une alliance de circonstance" entre le Premier ministre britannique et la chancelière allemande Angela Merkel. A en croire le PS, David Cameron "ne conçoit l'Europe qu'à la carte et au rabais".
Le Parti dénonce aussi "l'intransigeance égoïste de la chancelière Merkel - qui ne songe à rien d'autre qu'à l'épargne des déposants outre-Rhin, à la balance commerciale enregistrée par Berlin et à son avenir électoral". Le gouvernement français est vu comme le seul "sincèrement européen" par les grands pays de l'UE et doit "affronter démocratiquement la droite européenne". Le document socialiste doit être soumis aux militants le 16 juin prochain, en vue de la Convention du PS sur l'Europe.
Un tweet d'Ayrault en allemand. Dans la foulée, l'entourage de François Hollande a assuré que c'était "le PS qui s'exprim[ait]", et pas les autorités françaises, sans toutefois désavouer le texte. Forcé toutefois de calmer le jeu, le PS a un peu édulcoré la charge contre Angela Merkel, annonçant qu'il maintenait ses désaccords face à l'Allemagne, mais que Jean-Marc Ayrault était lui-même intervenu pour demander vendredi la suppression des "passages inappropriés à l'égard de l'Allemagne et d'Angela Merkel".
De fait, sera présentée mardi au bureau national du PS une nouvelle mouture du document expurgée de "toutes les références à Angela Merkel" car "il s'agit d'un combat politique, pas de stigmatiser telle ou telle personne", a assuré Jean-Christophe Cambadélis, secrétaire national du PS aux questions européennes, sur son site. En pleine polémique, le Premier ministre Jean-Marc Ayrault, s'est également fendu de deux tweets affirmant que "l'amitié franco-allemande" était "indispensable".
L'amitié franco-allemande est indispensable pour redonner un nouvel élan au projet européen et trouver les voies du retour de la croissance— Jean-Marc Ayrault (@jeanmarcayrault) 27 avril 2013
Des tweets également envoyés en allemand sur le compte du Premier ministre.
Um dem europäischen Projekt neuen Schwung zu geben und den Weg zurück zum Wachstum zu finden ist die deutsch-franz. Freundschaft zentral— Jean-Marc Ayrault (@jeanmarcayrault) 27 avril 2013
Un "péril mortel" pour Juppé. Alain Juppé, le maire UMP de Bordeaux, s'élève samedi dans Le Monde contre ce qu'il qualifie de "péril mortel". Revenant sur les propos de Claude Bartolone, le président socialiste de l'Assemblée nationale, qui veut engager la "confrontation" avec l'Allemagne, Alain Juppé commente : "une partie grandissante de la gauche veut engager une bataille politique contre la réduction des déficits en la mettant sur le compte d'une vision libérale allemande ou d'un penchant 'bureaucratico-bruxellois'". "On a rarement eu des relations aussi mauvaises" entre Paris et Berlin, a dénoncé François Fillon, pour qui François Hollande fait une "erreur gravissime" en misant sur une défaite de la chancelière à l'automne pour obtenir un changement de politique.
Dans Le Figaro, c'est Gilles Carrez, le président UMP de la Commission des finances de l'Assemblée, qui juge l'attitude de la gauche "peu responsable". "L’Allemagne est en train de devenir le bouc émissaire de l'échec économique et social de François Hollande", prévient-il. Michel Barnier, commissaire européen et membre de l'UMP, y est lui aussi allé de son commentaire, via Twitter, pour dénoncer "certaines attaques françaises insensées" contre Angela Merkel. Le Front national, de son côté, a dénoncé "l'hypocrisie" du PS qui "fait soudain mine de s'indigner de la politique d'austérité imposée par l'Allemagne de Angela Merkel à la France"