Dans l’affaire du Carlton de Lille, la ligne de Dominique Strauss-Kahn est claire. Mis en examen pour "proxénétisme aggravé en bande organisée", l’ancien patron du FMI répond "libertinage". Interrogé par la juge Stéphanie Ausbart le 26 mars dernier à Lille, "DSK" s’est défendu d’avoir su que les jeunes femmes qui participaient à des parties fines étaient en fait des prostituées, selon des extraits du PV d’audition exhumés par Le Figaro lundi. Il a aussi refusé de reconnaître que les fameuses soirées étaient organisées à son intention.
Pièges
L’ancien favori de l’élection présidentielle ne tombe ainsi pas dans le premier piège tendu par la magistrate. "Au total, une quinzaine de sorties, rencontres, voyages, tant à Paris, Lille, en Belgique, qu'à Washington, ont été organisées à votre intention par Fabrice Paszkowski (chef d'une entreprise de vente de matériel médical), David Roquet (responsable d'une filiale du groupe de BTP Eiffage) à partir de 2008", débute la juge. "Il ne m'est jamais apparu qu'elles étaient organisées à mon intention", réplique immédiatement DSK selon Le Figaro.
Plus tard, alors qu’elle évoque un échange de SMS entre Dominique Strauss-Kahn et Fabrice Paszkowski dans lesquels les deux hommes mentionnent des "copines", Stéphanie Ausbart questionne. "Si nous vous disons que dans le milieu du proxénétisme, “des copines” est le terme voulu par la bienséance pour désigner des prostituées ou des escort-girls, qu'avez-vous à répondre à cela?". La réponse de DSK est lapidaire : "Je ne connais pas le milieu des prostituées."
L’une des questions centrale, dans cette affaire, est de savoir si Dominique Strauss-Kahn savait que les filles qui participaient à ces soirées étaient des prostituées. Pour DSK, la réponse est non. Le nombre de partenaires différentes ne l’a pas mis sur la voie, jure-t-il. "J'ai compté qu'en tout il y avait eu six jeunes femmes. Cela ne me semble pas un nombre considérable", répond l’ex-patron du FMI selon Le Figaro. La différence d’âge ne l’a pas non plus alerté. "Madame, de nombreuses jeunes femmes avec qui j'ai pu avoir un commerce sexuel - le mot est mal choisi - une relation sexuelle, avaient la même différence d'âge", argue DSK.
Définition du libertinage
Dominique Strauss-Kahn affirme aussi qu’il n’aurait pas pris part à ces soirées s’il avait su que les jeunes femmes concernées étaient des prostituées. "Autant je pensais pouvoir faire confiance à des hommes et à des femmes avec qui je partageais le goût du libertinage, autant je n'aurais pas fait confiance à des prostituées qui sont susceptibles d'être l'objet de toutes sortes de pressions", assure-t-il.
Pour appuyer son propos, Dominique Strauss-Kahn tient aussi à expliquer à la juge d’instruction la différence entre la prostitution et le libertinage. "Il faut que vous compreniez quelque chose, le libertinage consiste à avoir des relations sexuelles libres et consenties. On en pense ce qu'on veut sur le plan moral mais elles ne sont pas tarifées", explique-t-il. "Le libertinage suppose le consentement et le plaisir commun, ce qui n'est pas le cas, à ma connaissance, d'une prostituée", argue-t-il encore. Enfin, sur les participantes : "J'ai souvent vu des jeunes femmes habillées comme vous et moi qui se changeaient à leur arrivée dans un club libertin pour mettre une tenue plus affriolante et cela n'en faisait pas des prostituées", insiste-t-il.
Reste à savoir si ces réponses auront été à même de lever les doutes sur la culpabilité de Dominique Strauss-Kahn dans l’esprit des magistrats instructeurs. Rien n’est moins sûr. Le Figaro rappelle ainsi que les juges ont remarqué que le réseau présumé a disparu dès le lendemain de l'interpellation de Dominique Strauss-Kahn, accusé de viol par Nafissatou Diallo, à New York le 14 mai 2011.