Ce que raconte le limogeage de Batho

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Fabienne Cosnay et Antonin André , modifié à
François Hollande a voulu asseoir son autorité et assurer la cohérence de l'exécutif.

Hollande "fort avec les faibles".  L'éviction de Delphine Batho au ministère de l'Ecologie ? "Ça dit des choses sur la personnalité de François Hollande : fort avec les faibles et faibles avec les forts", a sévèrement jugé Nathalie Kosciusko-Morizet, mercredi sur Europe 1. "Il y en a eu beaucoup des ministres qui se sont opposés au Premier ministre ou au président de la République. Montebourg, Hamon (…) Finalement, on veut faire acte d'autorité mais on fait acte d'autorité sans prendre trop de risque", a moqué l'ancienne ministre de l'Ecologie.

Les avertissements du président. En prenant la décision de se séparer de sa ministre de l'Ecologie, François Hollande a voulu asseoir son autorité et assurer la cohérence de l'exécutif. "Je l'ai dit aux ministres : vous ne pouvez pas, quand les temps sont durs pour les Français, commettre la moindre erreur. Je le répète comme un avertissement", avait-il déclaré une première fois sur France 2, le 28 mars. "Aucun ministre ne peut remettre en cause la politique qui est conduite", avait-il encore assuré, le 10 avril. De la parole, le président est donc passé aux actes, mardi soir. En critiquant le budget 2014, Delphine Batho a franchi la ligne rouge, manquant "à un principe majeur de solidarité et de cohésion gouvernementale", a estimé François Hollande. "Solidarité" et "cohésion gouvernementales", deux mots repris en boucle ce mercredi à la sortie du Conseil des ministres.

Batho, le limogeage facile. Certes, François Hollande a fait acte d’autorité, "mais c’est beaucoup plus facile de se montrer fort avec un faible", souligne dans son édito politique le journaliste d'Europe 1 Antonin André. Oui, François Hollande a montré qu'il savait trancher dans le vif et couper les têtes si besoin. A condition que ladite tête ne représente pas grand chose. Ce qui est le cas du soldat Batho, sacrifié pour l'exemple. "Une ministre isolée, un maillon faible, convoquée par Matignon via un tweet, l'humiliation suprême", note Antonin André. Peu audible politiquement, celle qui va retrouver son siège à l'Assemblée ne pouvait espérer recevoir le soutien de personne. Ségolène Royal ? L'ancienne candidate à la présidentielle et son ancienne protégée se sont brouillées depuis les législatives de juin 2012. Ses collègues du gouvernement ? Ils jugeaient Delphine Batho "trop perso".

montebourg et batho

Deux poids, deux mesures. "Il y a des ministres qui peuvent [critiquer le gouvernement], et qui sont immunisés par leur score à la primaire socialiste. Ce n'est pas le cas de Delphine Batho", soulignait le ministre écologiste Pascal Canfin, invité sur Europe 1 mardi soir. A l'UMP comme chez les Verts, on n'a pas manqué de fustiger la règle du "deux poids deux mesures" qui semble en vigueur au sein du gouvernement. "Arnaud Montebourg, il a un petit pouvoir (…) il a un courant, donc, macho macho, on ne le licencie pas !", a résumé Daniel Daniel Cohn-Bendit, mercredi sur Europe 1.  "Il y a les membres de la majorité que le président et le Premier ministre craignent et qu'ils laissent divaguer sur la place publique en permanence", a moqué l'ancien Premier ministre François Fillon.

Tout n'est finalement qu'une question de poids politique. Arnaud Montebourg peut continuer à défier la politique économique du gouvernement sans s'inquiéter des conséquences. François Hollande n'est pas prêt de prendre le risque de couper la tête du troisième homme de la primaire socialiste.