Plusieurs jours après sa mise en application, la réforme de la garde à vue fait débat. Le ministre de l'Intérieur, Claude Guéant , a estimé mercredi à Bobigny que tout s'était "bien passé" dans les commissariats et gendarmeries lors de l'application de la réforme de la garde à vue qui fait intervenir l'avocat dès le début de la procédure.
Le ministre, qui s'exprimait au cours d'un déplacement en Seine-Saint-Denis sur le thème de la sécurité, a évoqué l' "irruption de la nouvelle garde à vue", et noté que "grâce aux dispositifs de soutien mis en place, tout s'est bien passé".
Il a tout de même reconnu que certaines des "craintes" exprimées notamment par des syndicats de police s'étaient réalisées, en ce sens que des avocats ont eu "des interventions qui ne sont pas prévues par la loi", sans toutefois donner d'exemple.
"Nous serons extrêmement vigilants", a poursuivi le ministre en s'adressant aux policiers et gendarmes, pour que "votre travail puisse continuer et qu'on n'oublie pas la raison d'être de la garde à vue: aboutir à la vérité judiciaire", a-t-il conclu.
Au micro d’Europe 1 mercredi, Rachida Dati a indiqué que la garde à vue représentait "un outil indispensable pour lutter contre la délinquance et un outil dissuasif". L’ancienne ministre de la Justice a salué une "'réforme qui avait été saluée par les avocats". Mais elle a jugé que ce dispositif a été "fait dans l'urgence et portée dans la précipitation". Enfin, Rachida Dati a appelé de ses vœux une "réforme globale de la procédure pénale".
La fronde des barreaux
Plusieurs barreaux ont décidé de ne pas appliquer immédiatement la réforme de la garde à vue, pourtant réclamée de longue date par les avocats, invoquant des raisons de rémunération, les carences du texte ou le flou entourant sa mise en oeuvre précipitée.
Le mouvement demeurait toutefois limité mercredi à une dizaine de barreaux, sur un total de 161: Créteil, Roanne, Les Sables-d'Olonne, Vannes, Auxerre, Sens, Coutances, Alençon, outre Bobigny en grève depuis dix jours. Depuis Paris, le Conseil national des barreaux (CNB), estimant la grève "inadéquate" et contre-productive, redoublait de pédagogie.
Les syndicats des forces de police ont souvent critiqué cette réforme. Ces griefs portaient essentiellement sur le décalage observée entre les primes versées aux avocats commis d'office (300 euros) et celles réservées aux officiers de police judiciaire (50 euros par mois) pour ce type de procédure.
Pressés par une décision de la Cour de cassation, les ministères de l'Intérieur et de la Justice ont appelé vendredi dernier à la mise en oeuvre immédiate de dispositions prévues par la réforme qui devait entrer en vigueur le 1er juin.
Il s'agit en particulier de permettre à toute personne en garde à vue de demander qu'un avocat assiste à ses interrogatoires, alors que la loi ne prévoyait jusqu'à présent qu'un entretien de 30 minutes.