Les deux camps avaient prévenu qu’il ne fallait pas attendre d’étincelles du débat entre Jean-François Copé et François Fillon, jeudi sur France 2. En effet, les deux candidats à la présidence de l’UMP ont rivalisé de courtoisie et de cordialité l’un envers l’autre. Ils sont pourtant restés fidèles à leur style respectif, diamétralement opposés. Décryptage d’un non-match avec Arnaud Mercier, spécialiste en communication politique et professeur à l’université de Metz.
Un débat, quel débat ? Aucune attaque, plus de divergences que de différences, un refus catégorique du dire du mal de l’autre… "Il n’y a eu ni duel, ni débat", tranche Arnaud Mercier. "Même dans le dispositif à l’américaine, derrière les pupitres, il n’y a eu aucune interaction entre les deux hommes. Ils ont joué le grand jeu de ‘on s’aime, on se respecte’", analyse l’universitaire.
Tant François Fillon que Jean-François Copé ont donc retenu les leçons du passé. "Ils tiennent compte de l’histoire. Pendant la primaire socialiste, ils n’attendaient qu’une chose, c’est que les candidats se déchirent et offrent sur un plateau des arguments à la droite", rappelle Arnaud Mercier. "Ils retiennent aussi le psychodrame interne de la droite, qui dure depuis de nombreuses années, avec le souvenir cuisant de 1995, avec le duel fratricide entre Chirac et Balladur, explique l’expert.
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Pour autant, malgré cette prudence des deux côtés, "les deux candidats ont quand même tous les deux joué leur registre", relève-t-il.
Fillon dans "une forme de réserve". Depuis le début de la campagne interne à l’UMP, François Fillon a adopté la posture du sage, du fédérateur. "Il a insisté sur cette figure de rassembleur, avec des gestes simples, cadrés. Il prenait son temps pour répondre, avec une sorte de réserve", décrypte Arnaud Mercier. "Surtout, il joue beaucoup de son ancrage institutionnel, de son statut de Premier ministre sortant. Il est dans un positionnement d’autorité, selon lequel il est le leader naturel de l’opposition", poursuit l’expert en communication politique.
Copé "plus tonitruant". Jean-François Copé a été fidèle à l’image qu’il donne depuis le début de la campagne, celle de l’agitateur franc du collier. "Il a été plus tonitruant, a joué à fond la carte anti-journalistes, avec la dénonciation d’une pensée unique véhiculée par les médias", analyse Arnaud Mercier. "Il a été parfaitement cohérent avec le thème de la droite décomplexée, qui a encore servi à de nombreuses reprises ce soir."
A ce titre, l’histoire du pain au chocolat est des plus parlants. "Il assume totalement", note l’expert. "Il ne recule pas, au contraire, il en rajoute en brandissant des coupures de presse", rappelle-t-il.
Le bilan. En l’absence de réelle confrontation, difficile de dégager un vainqueur. "Personne n’a raté sa prestation", résume Arnaud Mercier. Seuls leurs styles différents se sont affirmés. "François Fillon joue la carte de la continuité du bilan de Nicolas Sarkozy, Jean-François Copé celui du style de Sarkozy. Le premier s’adresse aux électeurs et radicalise son discours pour les militants, le second s’adresse d’abord aux militants, les électeurs on verra après", résume le spécialiste.
La pseudo-confrontation n’aura en toux cas sans doute pas été décisive. "Le militant indécis de l’UMP n’aura sans doute pas eu les éléments pour se décider", conclut Arnaud Mercier.