La position initiale. Question brûlante, la Procréation médicalement assistée (PMA) a officiellement été repoussée afin de ne pas polluer les débats autour du mariage pour tous, actuellement en discussion à l’Assemblée nationale. C’est Jean-Marc Ayrault en personne qui l’a annoncé le 9 janvier sur son compte Twitter
La PMA mérite un débat en tant que tel, c’est pourquoi elle figurera dans le projet de loi famille. 2/2— Jean-Marc Ayrault (@jeanmarcayrault) January 9, 2013
Quelques jours plus tard, Alain Vidalies, ministre chargé des Relations avec le Parlement, précise le calendrier : "ce qui a été annoncé, c’est qu’elle serait dans un projet de loi Famille. Ce texte sera examiné en Conseil des ministres le 27 mars prochain." Ce dimanche 3 févier, Dominique Bertinotti, ministre de la Famille, confirme cette échéance : "la PMA sera abordée dans le cadre de ce projet de loi. C'est un engagement fort du gouvernement qui a une position claire sur ce sujet." Claire, jusqu’à ce dimanche 3 février…
>> A LIRE AUSSI : Ces enfants nés de mères porteuses
Le revirement d’Ayrault. En marge d’un déplacement officiel au Cambodge, le Premier ministre désavoue en effet publiquement sa ministre. Jean-Marc Ayrault rappelle ainsi que l'avis du Comité consultatif national d'éthique (CCNE) sur ce sujet est un préalable à tout examen du texte. Or, selon lui, "d'ici mars, ça sera trop court. Il (le Comité d'éthique, Ndlr) n'aura pas le temps de rendre un avis. Il a lui-même évoqué la nécessité d'un débat public". Et Matignon d’ajouter que "la question de la PMA peut être traitée toute seule", pas forcément dans la loi sur la famille.
Marche arrière toute ! Après une première intervention, Alain Vidaliès remonte sur le ring après une suspension de séance pour tenter de mettre fin à la cacophonie entre Jean-Marc Ayrault et sa ministre de la Famille. Il précise d’ailleurs dans son préambule qu’il parle avec l’accord du Premier ministre. Pour dire quoi ? Que, contrairement aux dires de Matignon quelques minutes plus tôt, "il y aura une seule loi portant sur l'ensemble des questions portant sur la famille, que cette loi comprendra la proposition du gouvernement sur la PMA, que le débat n'interviendra qu'après la connaissance de l'avis du Conseil national d'éthique et donc avant la fin de l'année". Autrement dit, si le CCNE n’a pas donné son avis avant le 27 mars, c’est l’ensemble de la loi sur la famille qui sera repoussé.
La majorité en colère… Ce flou dominical sur une question qui leur tient à cœur à mis mal à l’aise certains partenaires de la majorité. Sergio Coronado, député écologiste, a ainsi vivement protesté dans les couloirs de l'hémicycle : "la déclaration du premier ministre est un enterrement de première classe de la PMA. Depuis le début, on va d'hésitation en recul. Il est temps que le gouvernement ait une parole unique". L’élue communiste Marie-George Buffet ne l’a pas contredit : "on nage dans le flou. Qu'est-ce que c'est que cette parole gouvernementale démentie ? On ne sait plus qui croire !"
Bruno Le Roux, chef de file des députés socialistes à l’Assemblée nationale, avait accepté de ne pas déposer d’amendement en échange de l’inscription de la PMA dans la loi sur la famille. Les propos de Jean-Marc Ayrault sonnent là aussi comme un camouflet, qui l' a poussé à se faire menaçant : "s'il y a une loi sur la famille sans la PMA, le groupe prendra ses responsabilités pour que cette question soit discutée. Nous sommes ici pour faire la loi". Un peu plus tard,après avoir rappelé que le comité national d'éthique n'avait qu'un avis consultatif, il a de nouveau tapé du poing sur la table, au micro de BFMTV : "la PMA, bien entendue qu’elle sera votée ! C’est la position du PS depuis des années."
… et la droite se régale. Cette valse-hésitation a en revanche fait le bonheur de l’opposition, qui a fait de cette question de la PMA son cheval de bataille depuis une semaine. "Il y a un recul du gouvernement ! Un recul du gouvernement ça se prend et ça s'applaudit !", a ainsi lancé l’hyperactif député UMP Hervé Mariton dans l'hémicycle. "C'est important pour nous, pour tous les manifestants du 13 janvier et tous les Français qui pensent que le mariage pour les couples homosexuels entraînera la PMA", a-t-il poursuivi. De son côté, le président des députés UMP Christian Jacob a estimé que la ministre Bertinotti avait été "recadrée par le Premier ministre qui a décidé de faire marche arrière sur le sujet". Le député UMP Philippe Gosselin a quant à lui remis au gout du jour un mot que l’on espérait oublié dans la majorité : "couac".