La belle unité de l’UMP sur la question de l’Europe aura finalement duré… moins de 24 heures. Alors que, jeudi, Jean-François Copé avait fièrement lancé la campagne du parti qu’il préside pour le scrutin du 25 mai, distribuant ses premiers tracts et affichant à ses côtés les huit têtes de liste dans une démonstration d’harmonie, dès vendredi, une quarantaine d’élus UMP, emmenés par les frondeurs Henri Guaino et Laurent Wauquiez, se sont désolidarisées de la ligne officielle de leur formation. Tous ont signé une tribune dans Le Figaro intitulée : Europe : il est temps de tout changer.
"Trente années de dérives, d’aveuglement". Alors que Jean-François Copé était parvenu à un consensus entre fédéralistes et souverainistes en promouvant l’idée, somme toute assez floue, d’une "Europe à géométrie variable", les frondeurs signent eux un texte résolument souverainiste. "Trente années de dérives ont condamné l'Europe à devenir une machine bureaucratique qui réduit, jour après jour, l'espace des libertés et de la démocratie. Trente années d'aveuglements ont installé durablement sur notre continent le chômage de masse, l'exclusion, la stagnation économique", écrivent ces députés. "Au point où nous en sommes, le temps n'est plus à la valse-hésitation des ajustements à la marge du Meccano institutionnel. L'urgence est aux remises en cause profondes", poursuivent-ils.
"De ce constat, il nous faut maintenant tirer des conclusions politiques en rupture avec les atermoiements des dernières décennies. Notre famille politique doit le faire", enjoignent-ils ensuite, visiblement pas satisfaits par la ligne adoptée jeudi. "Ne nous y trompons pas : se résigner à inscrire la politique de la France dans le cadre d'une construction européenne à la dérive sans le changer profondément serait moralement inacceptable et politiquement intenable. Cette résignation nous condamnerait rapidement à l'échec si les Français nous confiaient à nouveau le destin du pays." Jean-François Copé est prévenu.
Guaino et Wauquiez en chef de file. Au total, 41 députés UMP ont signé cette tribune. Parmi eux se trouvent des députés relativement connus comme Jacques Myard, Lionnel Luca ou encore Gérald Darmanin. Mais c’est surtout l’identité des deux leaders de ce mouvement qui interpellent. Laurent Wauquiez comme Henri Guaino se sont tous deux distingués récemment par leur sortie fracassante sur les européennes.
Le premier ne cesse d’affirmer, comme mercredi sur Europe 1, qu’il veut le retour à une Europe à 6. Le second a fait encore plus fort en affirmant au début du mois qu’il ne voterait pas pour Alain Lamassoure, la tête de liste UMP dans la circonscription de Paris. "Je ne mettrai pas un bulletin à son nom, ça je peux vous le dire dès aujourd'hui. Je ne voterai pas pour l'incarnation d'une ligne qui est à l'opposé de ce que je pense et de ce que je crois être l'intérêt de mon pays", avait lâché Henri Guaino sur Public Sénat. Pour l’ancienne plume de Nicolas Sarkozy, Alain Lamassoure "incarne l'Europe dont plus personne ne veut."
Ça tacle sévère à l’UMP. Le principal intéressé n’a pas franchement apprécié. "Je n'admets pas que dans cette tribune on critique tout ce qui a été fait par la France au niveau européen depuis trente ans par Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy dont les signataires ont été ministre et conseiller, a tancé Alain Lamassoure (photo) sur RFO vendredi matin. Je lance un appel aux dirigeants de l'UMP. S'il apparaît qu'il y a un certain nombre de voix divergentes, il faut que la semaine prochaine, dès mardi, la direction de l'UMP explique clairement sa position et tire toutes les conséquences de cette situation", a-t-il ajouté, réclamant à mots couverts des sanctions.
Pour l’heure, Jean-François Copé n’a pas réagi. Mais il a sévèrement taclé, comme par anticipation, Laurent Wauquiez dès jeudi. "Etre un parti de gouvernement, ça veut dire être un parti responsable. Quand on est responsable de l'UMP, on ne peut pas dire n'importe quoi sur l'Europe", avait lancé le président de l’UMP. "Laurent Wauquiez a des positionnements individuels parce que populistes", avait-il tranché. Sauf que ce qui était vrai jeudi soir ne l’est plus vendredi matin. Laurent Wauquiez et Henri Guaino ne sont plus seuls. Et ça fait toute la différence.
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