Quand le chat n’est pas là, les souris… parlent. Jean-François Copé étant en vacances prolongées, certains, à l’UMP, en profitent pour réclamer un droit d’inventaire du mandat de Nicolas Sarkozy, ce que refuse pour le moment le patron du principal parti d’opposition. Mardi, c’est Patrick Devedjian et Hervé Mariton qui ont relancé le débat. Des voix loin d’être isolées. Tour d’horizon.
Laurent Wauquiez, vice-président de l'UMP, loin d’être un adepte du droit d‘inventaire il y a encore quelques semaines, a visiblement changé son fusil d’épaule, dans un entretien au Point daté du 15 août, affirmant qu’ "on ne construit pas un avenir sans tirer les leçons du passé". "C'est une question d'honnêteté, la droite a été au pouvoir pendant ces dix années, il faut donc en tirer le bilan si on ne veut pas revenir aux responsabilités en refaisant les mêmes erreurs", ajoute-t-il, en se défendant de vouloir dresser "une espèce de procès stalinien à Nicolas Sarkozy".
Patrick Devedjian. Longtemps proche de l’ancien chef de l’Etat, le député des Hauts-de-Seine s’est éloigné de la galaxie sarkozyste après la parution d’un livre au vitriol de son ancienne directrice de cabinet, dans lequel elle brosse un tableau accablant l’exercice du pouvoir de Nicolas Sarkozy. Mardi, dans Le Figaro, détaché de la fidélité au leader d’hier, Patrick Devedjian a donc décidé de taper du poing pour réclamer "une clarification idéologique de l’UMP" car selon lui, "la droite est aujourd'hui partagée entre la tentation de courir derrière le FN et l'imitation du PS".
"Quelle crédibilité pouvons-nous espérer aux yeux des Français si nous ne sommes pas capables de discerner ce qui a fonctionné et ce qui n'a pas fonctionné dans les politiques que nous avons mises en œuvre ?", s'interroge encore le président du conseil général des Hauts-de-Seine, avant de conclure : "si nous ne faisons pas d'inventaire, nous laissons le champ libre à la gauche pour caricaturer autant qu'elle le souhaite notre bilan".
Hervé Mariton. Après l’avoir réclamé le 8 aout dernier sur BFMTV, le délégué général de l'UMP au projet en a remis une couche, mardi, sur i>Télé. Le député de la Drôme a rappelé que si son camp, en 2012, a perdu les élections, "c'est donc que les Français n'étaient pas à ce point heureux de ce que nous faisions. C'est donc que ce que nous faisions n'était pas à ce point parfait..." Sa conclusion est sans équivoque : "il faut toujours faire une évaluation du passé sans ingratitude, sans insulte".
François Fillon. D’abord à petite dose, puis plus franchement depuis son discours fondateur de la Grande-Motte le 10 juillet dernier, le député de Paris a pris ses distances avec son ancien patron, pour mieux l’affronter lors de la primaire de 2016 qui déterminera le candidat de l’UMP pour la présidentielle de 2017. "Tout ce que l'on a fait pendant cinq ans est très bien mais n'est pas à la hauteur de ce qu'il faut faire pour redresser le pays", a-t-il lancé dans Le Figaro. Après la visite de Nicolas Sarkozy au siège de l’UMP, mi-juillet, suite au rejet de ses comptes de campagne par le Conseil constitutionnel, François Fillon a enfoncé le clou : "l’UMP ne peut vivre immobile, congelée, au garde à vous, dans l’attente d’un homme providentiel ! Chacun a le droit de vouloir servir son pays, mais personne ne peut dire ‘circulez ! Il n'y a rien à voir, le recours c’est moi !'"
Luc Chatel. Proche de Jean-François Copé, le numéro 3 de l’UMP s’est lui aussi prononcé, fin juillet, pour un débat critique sur les cinq ans de la présidence de Sarkozy. L’un des leaders du courant libéral et humaniste a estimé, sur Europe 1, que "l'UMP ne sera pas crédible en proposant les idées d'hier, elle sera crédible en faisant un vrai inventaire".
Jean-Pierre Raffarin, l’autre patron des humanistes de l’UMP, a d’abord délivré un satisfecit à Luc Chatel, sur Twitter.
ok avec @LucChatel, notre projet présidentiel sera crédible si nous le fondons sur un inventaire objectif de l'action passée (droite&gauche)— Jean-Pierre Raffarin (@jpraffarin) July 31, 2013
Puis l’ancien Premier ministre de Jacques Chirac, qui n’a jamais été un intime de Nicolas Sarkozy, a chargé la mule dans un article publié dans l'Etat de l'opinion 2013, la revue de TNS Sofres, et intitulé "Sarkozy : les cinq occasions manquées", dans lequel il liste les erreurs de l’ancien président.
Valérie Pécresse va encore plus loin que ses camarades. L’ancienne ministre du Budget a prévu de sortir un livre à la rentrée dans lequel elle va dresser, seule, le bilan des années Sarkozy. "Nous avons un devoir d’inventaire en même temps qu’un devoir de proposition", expose-t-elle dès la préface, selon le JDD.
Pierre Lellouche, ancien secrétaire d’État chargé du Commerce extérieur dans le gouvernement Fillon, se pose lui aussi des questions, et exige des réponses : "j'aimerais bien qu'on me dise pourquoi on a perdu toutes les élections depuis 2007 ? Pourquoi est-ce qu'on n'a pas fait à temps un certain nombre de changements importants comme les 35 heures, l'ISF ou la fiscalité ou le code du travail ?"
Roselyne Bachelot. La langue de bois, elle ne connaît pas. Et c’est encore plus vrai depuis qu’elle a quitté la vie politique pour le petit écran. Alors quand elle est interrogée sur les raisons de la défaite de Nicolas Sarkozy, l’ancienne ministre de la Santé, proche de François Fillon, ne tourne pas autour du pot : "qu'est-ce qu'on va faire, on ne va rien dire ? On a perdu la présidentielle et les législatives. On a laissé une centaine de nos compagnons sur le terrain, on va passer au milieu des cadavres en chantonnant ?", s'interrogeait-elle dans le JDD, dès le mois de juin 2012.