L'expression d'une lassitude. "A un moment, il faut s'arrêter de courir. Parce que si on court tout le temps, on va finir par se mettre dans le vide. Et là, j'ai besoin de dormir, de ne rien faire, de bayer aux corneilles". Dans une interview à Hexagones, site d'informations en ligne, publiée mardi, Jean-Luc Mélenchon, le leader charismatique du Parti de gauche, confie sans détour ses doutes et lassitudes et annonce qu'il va prendre du recul dans les prochains mois.
"J'ai besoin de temps". Fatigué par les cinq années "terribles" qu'il vient de passer, Jean-Luc Mélenchon annonce qu'il va prendre du champ pour laisser de l'espace aux nouveaux visages qui ont émergé au Parti de gauche, constatant "l'échec" du Front de gauche. "J'aspire à ce que le niveau de pression sur moi baisse. Ça fait cinq ans que ça dure et ce n'est pas bon. On finit par ne plus raisonner aussi tranquillement qu'on le devrait", déclare le responsable politique. Pas de retrait de la vie politique, donc, mais une volonté de passer le flambeau. "Pour moi, ce n'est pas me mettre en retrait, c'est m'utiliser autrement", explique-t-il. "J'ai fait mon temps à organiser la vie d'un parti. J'essaie de cristalliser quelque chose qui existe en dehors de moi. J'ai besoin de temps, je ne peux plus continuer comme cela".
"L'échec du Front de gauche". Jean-Luc Mélenchon dresse d'autre part un bilan sévère du Front de gauche: "On est dans une période où l'on a besoin de se reposer. Parce qu'on vient de passer cinq ans terribles. Nous sommes en échec", souligne le co-président du Parti de gauche en attaquant notamment ses partenaires communistes qui ont scellé des accords avec le Parti socialiste aux municipales de 2014. "Pour moi la séquence a été écrite entre deux européennes : on a fondé le Front de Gauche pour les européennes de 2009 et à la suivante on passait devant le PS. Tout était en place. Tout ça a été planté pour une poignée de postes aux municipales", fustige-t-il. Le fond du problème du Front de gauche, qu'il a contribué à créer en 2008, réside donc bien là : "l'ambiguïté depuis le début" sur l'attitude à avoir à l'égard du Parti socialiste. Les communistes estiment, selon lui, qu'on "peut rectifier le tir du PS" tandis que d'autres, comme le PG, considèrent qu'il faut l'autonomie par rapport au parti de la rue de Solférino.
Le Pen "va y arriver en 2017". Jean-Luc Mélenchon dit avoir espéré pouvoir prolonger "l'insurrection" après sa campagne de 2012 mais estime avoir été étouffé par "le poids du retour aux vieilles traditions partiaires, aux arrangements, aux accords électoraux". Le grand gagnant de ces arrangements, précise-t-il, est le Front national qui serait dopé par la stratégie des dirigeants du PS, "à commencer par François Hollande", qui pensent que "le "moindre risque (...) c'est que Le Pen soit le plus fort possible, 'comme ça je suis sûr de gagner au second tour'". Et de prédire que la dirigeante du parti frontiste "va y arriver" lors de la présidentielle de 2017.