Françafrique : le casse-tête pour Hollande

François Hollande avec le Gabonais Ali Bongo.
François Hollande avec le Gabonais Ali Bongo. © MAXPPP
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Le chef de l’Etat avait promis de mettre fin à la Françafrique. Il s’y emploie, au moins sur la forme.

La phrase figure dans la 58e proposition du candidat François Hollande. "Je romprai avec la Françafrique, en proposant une relation fondée sur l’égalité, la confiance et la solidarité", s’engageait le désormais président de la République. Arrivé aux affaires, le chef de l’Etat s’emploie à concilier cette promesse et la fameuse "Realpolitik". Pas évident en pratique, surtout quand il s’agit de se rendre, samedi, à l’occasion du Sommet de la Francophonie, en République Démocratique du Congo (RDC), classée… 155e au classement des démocraties dans le monde. Là, il y rencontrera, protocole oblige, le président autoritaire Joseph Kabila.

Pour amoindrir l’impact des images des deux dirigeants côte-à-côte, l’entourage du président, qui a d’ailleurs longtemps songé à boycotter le rendez-vous, a soigneusement balisé le voyage.

Kinshasa, la première fois

D’abord, quelques jours avant son voyage, François Hollande a pris soin de critiquer le régime congolais. "La situation dans ce pays est tout à fait inacceptable sur le plan des droits, de la démocratie, et de la reconnaissance de l’opposition", a dénoncé le président français en compagnie du secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, lors d’une conférence de presse le 9 octobre à l’Elysée.

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Ensuite, le président français a décidé de faire le service minimum. Il ne passera qu’une journée dans la capitale congolaise, et n’y passera pas la nuit, une décision lourde de symbole. Enfin, il consacrera deux fois plus de temps aux opposants de Joseph Kabila (photo), dont Etienne Tshisekedi, le plus célèbre d’entre eux. Le président congolais devra lui se contenter d’une entrevue d’une heure et demie. Au vu du contexte, les échanges pourraient être tendus.

A l’Elysée, le grand ménage

François Hollande a une faiblesse qui, en matière de questions africaines, peut se transformer en qualité : il ne connaît pas l’Afrique. Le chef de l’Etat n’y a même jamais mis les pieds hormis lors d’un voyage en Algérie avec l’ENA. Difficile donc de le soupçonner d’entretenir des réseaux occultes avec le continent noir.

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Le président de la République n’a d’ailleurs pas attendu son premier voyage en Afrique pour donner des signes de rupture avec la Françafrique. Dans la composition de son gouvernement, d’abord. Le ministère de la Coopération, rebaptisé Développement, a été confiée à Pascal Canfin, non-spécialiste des questions africaines et à ce titre vierge de tout réseau et donc de toute suspicion.

Par ailleurs, les questions africaines, longtemps chasse gardée de l’Elysée, ont été placées sous l’autorité de ministère de l’Intérieur, donc au sein de la diplomatie générale. Au palais présidentiel, le secteur reste tout de même pourvu. Mais Hélène Le Gal, nouvelle "Madame Afrique" et son adjoint Thomas Meloni, prendront théoriquement leurs ordres auprès du conseiller diplomatique Paul Jean-Ortiz et non plus directement auprès du chef de l’Etat. Théoriquement du moins. D’aucuns auront ainsi remarqué qu’Hélène Le Gal avait conservé les bureaux du célèbre 2, rue de l’Elysée.

Satanée "Realpolitik"

Et puis il y a, aussi, cette satanée Realpolitik. Début juillet, François Hollande a reçu successivement trois chefs d’Etat africains : le Guinéen Alpha Condé et le Sénégalais Macky Sall, démocratiquement élus, mais aussi le Gabonais Ali Bongo, dont l’élection n’avait pas été des plus transparentes. "Il faut parler avec l’ensemble des chefs d'Etat africains", se justifiait-on à l’Elysée. "Surtout avec un pays comme le Gabon où nous avons des milliers de ressortissants, l’une des deux implantations militaires de la France en Afrique, et beaucoup d'entreprises".