"Jamais il n’y a eu de cabinet noir". Claude Guéant est catégorique. Le ministre de l’Intérieur nie vendredi dans le journal Libération avoir dirigé une cellule clandestine à l'Elysée chargée de museler la presse et de parer aux dangers suscités par certaines enquêtes judiciaires.
Dans cet entretien, que Claude Guéant lui-même a souhaité avec la rédaction du quotidien, il répond aux principales accusations portées par Libération au cours de ses derniers mois. Et particulièrement sur l'existence de ce que le journal qualifiait de "cabinet noir" au sommet de l'Etat au plus fort de l'affaire Bettencourt ou encore sur des réseaux parallèles dont il aurait été l'architecte en tant que secrétaire de l'Elysée.
"Je ne connais pas les travers qu'on leur prêtent"
Le ministre admet avoir réuni, quand il était secrétaire général de l'Elysée de mai 2007 à février 2011, des personnalités pour faire face aux accusations portées contre le parti majoritaire et Nicolas Sarkozy dans l'enquête visant l'héritière de L'Oréal Liliane Bettencourt. Et Claude Guéant s’explique sur ses relations avec des hommes d’affaires présentés comme spécialistes de la corruption.
Le ministre détaille ainsi les relations qu’il entretient avec Robert Bourgi, Alexandre Djouhri et Ziad Takieddine, qu'il dit fréquenter uniquement pour leurs avis judicieux. "Je les connais, je vous l'ai dit. Mais je ne les connais pas par les travers que certains leur prêtent", assure-t-il dans le quotidien.
Takieddine, "peu recommandable"
"C'est vrai que concernant Takieddine, il apparaît aujourd'hui qu'il a fait des choses que la loi et la morale réprouvent, mais pour les autres, je ne dirais pas qu'ils sont ‘peu recommandables’ parce que je ne le sais pas", détaille le ministre indiquant qu’il l’a rencontré pour des relations avec la Libye et la Syrie. "Il y a peut-être eu des histoires de commissions, mais moi je m'occupais de la promotion des intérêts français", dit-il.
Et ce, alors que l'intermédiaire de contrats d'armement Ziad Takieddine a été mis en examen mercredi par le juge Renaud van Ruymbeke pour des malversations présumées, sur fond de soupçons de financement illicite de la campagne présidentielle d'Edouard Balladur en 1995.
Djouhri, "quelqu’un d’intéressant à écouter"
Claude Guéant indique également dans Libération avoir rencontré l'homme d'affaires Alexandre Djouhri en 2006, un an après Ziad Takieddine. Il explique l'avoir ensuite rencontré "sur un rythme mensuel". "C'est quelqu'un qu'il est intéressant d'écouter... ou plutôt d'entendre", assure-t-il. Et le ministre de préciser : "je ne connais pas tout de lui, mais j'ai des relations amicales avec lui. C'est quelqu'un de très séduisant. Intéressant".
De là à le qualifier de sulfureux, Claude Guéant rectifie : "il est né dans une banlieue pauvre et il est devenu riche. Ca ne suffit pas à en faire quelqu'un de sulfureux".
Bourgi, "animé par des considérations personnelles"
Le ministre de l'Intérieur est également revenu sur ses relations avec l'avocat Robert Bourgi, qui a accusé Jacques Chirac et Dominique de Villepin d'avoir reçu par son intermédiaire des fonds occultes africains, qu’il "voyait quand (il était) à l'Elysée" comme secrétaire général. La raison ? "Parce que c'était un bon connaisseur de l'Afrique", reconnaît-il.
"J'ai essayé de comprendre sa démarche. Il m'a expliqué qu'il était animé par des considérations personnelles", rapporte Claude Guéant.
Reste que Claude Guéant admet par ailleurs que l'avocat Robert Bourgi avait déjà parlé à Nicolas Sarkozy, avant ses déclarations de dimanche dernier à la presse, des valises de billets qui auraient été remises par des dirigeants africains à Jacques Chirac et Dominique de Villepin.