La goutte d'eau qui a fait déborder le vase. L'interview de Jean-Marie Le Pen à Rivarol, dans laquelle le fondateur du Front national défend le maréchal Pétain, répète ses propos sur le "détail de l'histoire" et affirme que "nous sommes gouvernés par des immigrés et des enfants d'immigrés à tous les nouveaux", a rendu Marine Le Pen furieuse. Dans un communiqué publié mercredi, la présidente du FN estime que "Jean-Marie Le Pen semble être entré dans une véritable spirale entre stratégie de la terre brûlée et suicide politique". Et prend clairement position contre sa candidature en Paca aux élections régionales de décembre prochain.
Ce qu'elle a écrit. "J'ai informé Jean-Marie Le Pen que je m’opposerai, lors du bureau politique du 17 avril prochain qui doit investir les têtes de listes pour les élections régionales, à sa candidature en Provence-Alpes-Côte d’Azur", écrit Marine Le Pen. "Son statut de Président d’honneur ne l’autorise pas à prendre le Front National en otage, de provocations aussi grossières dont l’objectif semble être de me nuire mais qui, hélas, portent un coup très dur à tout le mouvement". Marine Le Pen annonce aussi la convocation d'un bureau exécutif "rapidement", "afin d’envisager avec lui les moyens de protéger au mieux les intérêts politiques du Front National".
La réaction des cadres. La surenchère de Jean-Marie Le Pen, qui a donc choisi d'en remettre une couche après avoir répété ses propos sur la Shoah la semaine dernière, a été condamnée en chœur par plusieurs cadres du FN mercredi. "Malgré toutes les tentatives qui ont été faites pour lui faire entendre raison, il est resté le vieil acteur, sur de vieilles planches, à réciter son vieux texte triste", a déclaré mercredi sur Europe 1 Gilbert Collard, député du Rassemblement bleu marine (RBM), parlant d'"un homme qui n'accepte pas que le rideau tombe".
"La rupture politique" avec Jean-Marie Le Pen "est désormais totale et définitive", a affirmé Florian Philippot, vice-président du parti, sur Twitter. "Sous l'impulsion de Marine Le Pen des décisions seront prises rapidement". Louis Aliot, lui aussi vice-président du FN et compagnon de Marine Le Pen, a pour sa part qualifié de "parfaitement scandaleux" l'entretien de Jean-Marie Le Pen à Rivarol. "Nos désaccord politiques (sont) désormais irréconciliables", ajoute l'eurodéputé sur Twitter, avant de s’exprimer en longueur dans Europe 1 Soir.
Sorties intempestives. "C'est une crise sans précédent", reconnaît Marine Le Pen, interrogée par Le Monde. Les sorties intempestives de Jean-Marie Le Pen posent problème depuis plusieurs années à celle qui a succédé à son père à la tête du FN en 2011. Mais la tension s'est accentuée ces derniers mois, notamment depuis juin dernier et l'affaire de la "fournée" promise par le président d'honneur du FN à des artistes de confession juive.
Ne pas "sacrifier" Jean-Marie Le Pen. Si Jean-Marie Le Pen est lâché par Marine Le Pen et ses troupes, il compte encore un soutien parmi les "historiques" du mouvement. Le député européen Bruno Gollnisch appelle en effet à ne pas "sacrifier" le fondateur du Front national. "Le respect de la discipline de notre mouvement, la légitime et fructueuse direction de sa présidente, l'accueil de personnalités de qualité venant d'autres horizons doctrinaux me paraissent pouvoir être compatibles avec la liberté d'expression de Jean-Marie Le Pen, à qui nous devons l'existence même du Front national et sa progression au milieu de tant d'épreuves passées", ajoute-t-il.
Et Jean-Marie Le Pen dans tout ça ? alors que tous les ténors du parti (ou presque) souhaitent des sanctions, lui s'est contenté d'un communiqué laconique, dans lequel il promet qu'il ne baissera pas les bras : "la Présidente du Front national a convoqué le 17 avril, en séance extraordinaire, le bureau politique et a inscrit à l’ordre du jour les investitures des têtes de liste aux élections régionales. C’est devant cette assemblée délibérante que j’exposerai mon point de vue, celui d’un homme politique responsable, libre, qui a toujours marché tête haute et mains propres." C'est dit.
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