Le week-end a été dominé par les réactions aux propos de Claude Guéant sur la viande halal. A gauche, au centre, mais aussi à droite, des voix se sont élevées pour dénoncer ses déclarations polémiques. Le ministre de l’Intérieur a affirmé vendredi lors d’un meeting à Velaine-en-Haye, près de Nancy, qu’accorder le droit de vote aux étrangers pourrait conduire à ce que "des étrangers rendent obligatoire la nourriture halal" dans les cantines.
"Des propos nauséabonds" pour le PS
Plusieurs personnalités du Parti socialiste ont condamné ces déclarations. Pour la première secrétaire du PS Martine Aubry, les propos de M. Guéant "ne méritent que du mépris".
Evoquant un "ministre à la dérive", le porte-parole de François Hollande, Manuel Valls, a fustigé samedi des "propos nauséabonds", "à l'image de la campagne de Nicolas Sarkozy".
Le directeur de campagne du candidat socialiste, Pierre Moscovici, a rebondi, lui, sur la proposition d’étiqueter la viande halal lancée samedi par Nicolas Sarkozy lors d’un meeting à Bordeaux. "Au lieu d'étiqueter, il faut réglementer les techniques d'abattage, faire en sorte qu'il y ait de la transparence et de la qualité", a déclaré le député du Doubs.
"Cette question de l'étiquetage a déjà été envisagé au niveau du Parlement européen qui s'y est refusé parce qu'il y a aussi une question économique pour la filière, la filière ovine-bovine, et la filière de l'abattage qui connaît de grandes difficultés", a-t-il poursuivi.
Dati et NKM prennent leurs distances
C’est sur la question de la méthode d'abattage que Rachida Dati réagit dans un entretien au Figaro daté de lundi. "Aucun établissement scolaire public en France n'a de ‘cantine halal’ aujourd'hui. Mais les Français doivent connaître les méthodes d'abattage des animaux dont ils consomment la viande. Le Parlement européen a ouvert la voie à cela", déclare l’ancienne Garde des Sceaux.
Elle regrette dans cette interview le lien établi par Claude Guéant entre viande halal et vote des étrangers. "Je ne peux pas souscrire à des propos qui assimilent les musulmans français à des étrangers. Les Français de confession musulmane sont des citoyens comme les autres", dit-elle.
La porte-parole de Nicolas Sarkozy a elle-même pris ses distances avec Claude Guéant dimanche. "Il y a assez de raisons d'être contre le vote des étrangers aux élections (...) il y a assez de raisons d'être contre des repas confessionnels à la cantine pour qu'il ne soit pas nécessaire de faire un lien entre les deux", a déclaré Nathalie Kosciusko-Morizet.
"Surtout, ce que je ne voudrais pas, c'est que la polémique cache la vraie question qui est ‘pourquoi les socialistes veulent absolument le droit de vote des étrangers aux élections (locales)?’", a-t-elle ajouté.
Bayrou dénonce "une dérive"
Au centre, François Bayrou a pour sa part déploré une manière de faire "flamber le sujet". "Je trouve mal qu'on passe son temps à répéter ces mots (islam, burqa, halal, etc.) pour que la détestation jaillisse entre gens qui vivent sur le même sol", a-t-il déclaré dimanche. "On est en train d'assister à une dérive qui va amener ou qui vise à amener à l'explosion de la société française", estime le candidat centriste.
Mélenchon juge "tout cela grotesque"
Quant à Jean-Luc Mélenchon, il a trouvé "tout cela grotesque". "La République, je m'excuse, ce n'est pas la viande halal ou casher. C'est un modèle d'organisation de la société. La laïcité, c'est la séparation des églises et de l'Etat. Les abattoirs ne sont pas ni dans l'Eglise ni dans l'Etat", a-t-il vivement déclaré au "Grand rendez-vous" Europe 1/Itélé/Le Parisien-Aujourd'hui en France.
Côté musulmans, l'Union des associations musulmanes (UAM) de Seine-Saint-Denis, réputée proche de la droite, s'est étonnée samedi des propos du ministre "tombé très bas": "On attend maintenant le meeting Nicolas Sarkozy le 11 mars à Villepinte. Il a intérêt à faire des signes. S'il rate ce rendez-vous, il lui sera difficile de récupérer le vote des musulmans", a mis en garde son président Mohamed Mechmache.