Actuellement, il a tout contre lui. L'opposition, qui n'a de cesse de dénoncer sa "lenteur". Des sondages en chute libre. Une partie de son camp, qui réclame une inflexion de sa politique à gauche. Les indicateurs économiques, qui sont au rouge. Même une partie de la presse, plutôt bienveillante avec lui pendant la présidentielle s'est mise au "Hollande-bashing" ("Et si Sarkozy avait eu raison ?", "Secoue-toi, il y a le feu !", nldr). Et malgré de multiples tentatives pour rassurer les impatients du changement, François Hollande n'en finit plus de chuter dans les sondages.
Dimanche soir, sur TF1, le chef de l'Etat va donc essayer d'inverser la tendance dans ce qui sera sa première interview télévisée de la rentrée. Une intervention "à haut risque", juge un proche de François Hollande. Comment François Hollande peut-il espérer rebondir ? Europe1.fr a posé la question à Jean-Christophe Alquier, de l'agence de communication institutionnelle Ella Factory et spécialiste de la communication de crise.*
Un discours de vérité sur la crise
La crise est "d'une gravité exceptionnelle, longue", prévenait François Hollande il y a une semaine à Châlons-en-Champagne. Affirmant avoir le "devoir de dire la vérité aux Français", le président de la République employait alors des termes quasi-absents, jusqu’à présent, de son vocabulaire. Un discours de vérité réitéré devant la Cour des Comptes vendredi.
François Hollande à Châlons-en-Champagne :
Ce virage amorcé par le chef de l'Etat doit, selon Jean-Christophe Alquier, prendre toute sa dimension. Comment ? En "posant un discours sur la crise et en arrivant à la qualifier", explique-t-il. François Hollande "doit produire un acte de reconnaissance de la gravité de la crise pour donner derrière une grille de lecture à son discours", ajoute le spécialiste en communication.
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Aider les Français à comprendre
Il existe un "problème de perception" nécessitant sans doute "davantage de pédagogie", reconnaissait, dimanche dernier, sur Europe 1, le ministre délégué aux Affaires européennes Bernard Cazeneuve. C'est justement la raison officielle de l'intervention du chef de l'Etat dimanche soir : "expliquer" l'action gouvernementale. Un moment de pédagogie sur lequel François Hollande ne peut faire l'impasse, explique le communicant Jean-Christophe Alquier.
François Hollande se retrouve, d'après lui, face à une "sorte de dissonance cognitive", qu'il décrit par une métaphore : "on est face à quelqu'un qui nous dit 'il y a le feu', mais dans le même temps qu'on doit prendre le temps pour l'éteindre (en faisant des réformes structurelles, nldr)". Le chef de l'Etat doit donc "aider les Français à comprendre qu'il est sur un tempo de moyen terme", affirme le spécialiste en gestion de crise.
Accélérer le calendrier
Comme l'a déjà fait Cécile Duflot, montée au créneau sur l'épineuse question du logement social, François Hollande doit, explique Jean-Christophe Alquier, entrer dans une phase d'intensification, non pas des annonces, mais de la mise en œuvre de certaines des mesures promises. Ce que disait vendredi matin en d'autres termes le ministre du Travail Michel Sapin sur Canal + : "il doit fixer le rythme. Et c'est normal qu'on change aussi de rythme, qu'on adapte le rythme".
Un changement de tempo déjà amorcé il y a semaine. Accueilli au son de "le changement, c'est pour quand ?". A la foire de Châlons-en-Champagne vendredi dernier, le chef de l'Etat avait annoncé vouloir accélérer le calendrier de certaines réformes, notamment sur les emplois d'avenir.
>> Hollande cherche à imposer son tempo
Se "représidentialiser"
François Hollande peine-t-il à trouver le bon équilibre dans l'exercice de sa nouvelle fonction ? A en croire plusieurs Unes de journaux, le chef de l'Etat, victime de sa "normalitude", aurait besoin de se "secouer", de se "réveiller". Le président de la République doit-il donc revoir son style ? Pour le spécialiste en communication Jean-Christophe Alquier, pas de doute, François Hollande "doit incarner la fonction présidentielle de manière différente".
Sa "présidence normale" s'est, observe-t-il, un peu éloignée de certains champs régaliens qu'occupe normalement un président. Le spécialiste donne l'exemple de la Syrie : François Hollande "a montré qu'il ne s'était pas occupé de cet espace-là", analyse-t-il. Il ne restait plus à la droite qu'à s'engouffrer dans la brèche pour pilonner l'attentisme présumé du chef de l'Etat. En terme de posture, François Hollande gagnerait donc à se "représidentialiser", conclut Jean-Christophe Alquier.
*Jean-Christophe Alquier a notamment géré la communication de sortie de crise de l''Erika"