Le calendrier est ainsi fait que François Hollande aura eu deux événements à célébrer en deux jours. D’abord son anniversaire, puisque le chef de l’Etat, actuellement en vacances dans le Var, a eu 58 ans dimanche. Ensuite les 100 jours de son élection à la présidence, mardi. Une période d’un peu plus de trois mois certes symbolique, mais qui permet de tirer un premier bilan de l’action du successeur de Nicolas Sarkozy à l’Elysée. Et le résultat révèle plusieurs paradoxes. Europe1.fr dresse le bilan de la "présidence normale" version François Hollande.
La "normale attitude". Pendant la campagne, François Hollande avait martelé son désir d’être un président normal. Depuis son accession à l’Elysée, il multiplie les signes de cette normalité revendiquée. D’abord, il n’habite pas, avec sa compagne Valérie Trierweiler, dans le palais présidentiel, mais dans leur appartement du 15e arrondissement de Paris. Ensuite, il préfère souvent le train, pour des trajets parfois forts médiatisés. Son voyage de Madrid à Bruxelles, le 23 mai dernier, au côté du Premier ministre espagnol Mariano Rajoy n’était ainsi pas passé inaperçu.
Enfin, loin de yacht ou de villa américaine luxueuse, François Hollande a choisi la sobriété pour ses premières vacances en tant que chef de l’Etat. Afin de trancher avec le faste ostentatoire des premiers mois du quinquennat de Nicolas Sarkozy, le chef de l’Etat s’est rendu avec sa compagne dans le rustique fort de Brégançon, dans le Var.
Et cette normalité de bon aloi, les membres du gouvernement Ayrault ont eu pour consigne de se l’appliquer d’abord à eux-mêmes. Pas de vacances clinquantes donc, mais des congés en France, et surtout des ministres mobilisables à tout instant.
Détricotage à l’Assemblée. Pendant près d’un mois, du 3 au 31 juillet, l’Assemblée nationale s’est réunie en session extraordinaire pour étudier la loi de finance rectificative voulue par François Hollande. Pendant ces quatre semaines de travaux, les députés se sont aussi attachés à "rectifier" l’action de Nicolas Sarkozy pendant son quinquennat. Exit donc la TVA sociale, les exonérations de charge sur les heures supplémentaires ; revus, les abattements sur les donations et successions ; annulé, le bénéfice du relèvement du seuil de l’ISF… La droite a eu beau crier au scandale, une partie de l’œuvre de Nicolas Sarkozy a bel et bien été effacée des tablettes.
Des premières mesures saluées… La plupart des mesures adoptées par François Hollande recueille un large satisfecit, à en croire un sondage publié dimanche par Ifop pour Le Figaro. C’est surtout vrai pour la baisse des salaires du président et des ministres (82% de satisfaction) et pour le retrait d’Afghanistan (75%), un peu moins pour le coup de pouce du Smic de 2% (59%) et l’augmentation de l’Allocation rentrée scolaire (56%). Les deux seules mesures majoritairement impopulaires concernent la fin de la défiscalisation des heures supplémentaires et la fiscalité plus élevée sur les successions et les donations. Deux mesures emblématiques du quinquennat Sarkozy.
Mais un pessimisme ambiant… Malgré ce satisfecit sur les premières mesures mises en œuvre, les Français restent paradoxalement pessimistes sur les capacités de François Hollande à remplir plusieurs objectifs. Une majorité de personnes interrogées ne font ainsi pas confiance au chef de l’Etat sur tous les sujets évoqués dans la même étude Ifop : trouver une solution européenne à la crise (51%), lutter contre l’insécurité (56%), réduire la dette et le déficit (60%), lutter contre la désindustrialisation (58%), faire reculer le chômage (63%) et lutter contre l’immigration clandestine (62%). Un pessimisme ambiant avec lequel le gouvernement et François Hollande vont devoir composer à la rentrée.
Et une popularité en berne. Autre paradoxe, et de taille : alors que 57% des Français estiment que François Hollande tient ses engagements pris pendant la campagne, et alors que ces mêmes engagements recueillent leur assentiment, la popularité du chef de l’Etat reste en berne. Seuls 46% des personnes interrogées se disent satisfaites, contre 54% qui s’estiment mécontentes. On est très loin des 66% de popularité recueillis par Nicolas Sarkozy en juillet 2007. Mais l’ex-chef de l’Etat avait ensuite connu une chute vertigineuse, avec, un an après on élection, avec 72% de mécontent en avril 2008. Une évolution que François Hollande tentera de ne pas suivre.
L’épineux dossier syrien. Voilà une affaire propre à gâcher l’été du président de la République. Depuis plusieurs jours, François Hollande est attaqué par l’opposition pour son inaction en ce qui concerne la situation en Syrie. C’est Nicolas Sarkozy en personne qui a ouvert les hostilités en fin de semaine dernière, et depuis, les ténors de la droite se sont succédés pour reprendre le refrain. Jean-François Copé, puis Dominique de Villepin, enfin François Fillon. Le chef de l’Etat connaît là l’un de ses dossiers prioritaires de la rentrée.
Les couacs. Voilà 12 ans que la gauche n’avait pas occupé de fonctions gouvernementales. Alors forcément, au début, la machine a été difficile à mettre en route. En annonçant le retour à la semaine de quatre jours dès la fin mai, le ministre de l’Education Vincent Peillon est allé ainsi un peu vite et a eu l’honneur du premier recadrage de Matignon. Puis en répétant être favorable à la dépénalisation du cannabis, c’est la titulaire du portefeuille du Logement, Cécile Duflot, qui a eu droit au sermon de Jean-Marc Ayrault. La même Cécile Duflot a ensuite été accusée d’avoir attribué des légions d’honneur à ses amis politiques lors de la promotion du 14-Juillet, déclenchant une brève polémique.
Crise oblige, François Hollande n’a en fait pas pu bénéficier du fameux état de grâce consécutif à la victoire à l’élection présidentielle. Mais si la popularité du chef de l’Etat reste correcte, il sait désormais que la rentrée s’annonce mouvementée. Le président de la République doit regagner au plus tard l’Elysée le 21 août.