"Ça y est, c’est le grand basculement. Vous ne vous en rendez peut-être pas rendu compte, mais la France vient de changer de modèle politique. Nous sommes entrés en social-démocratie." Ainsi ironisait Natacha Polony lundi matin sur Europe 1, en commentant les éditoriaux traitant de l’intervention de François Hollande dimanche soir sur TF1.
Ecoutez la revue de presse (à partir de 1’45’’) :
Europe1.fr met sur pause et interroge Stéphane Rozès, politologue, sur ce qu’est la social-démocratie et son éventuelle transposition en France.
Mais au fait, c’est quoi la social-démocratie ? La formule résume à elle seule l’esprit de cette branche du socialisme, où tout doit partir des rapports sociaux. "C’est un modèle où, dans des pays comme l’Angleterre et l’Allemagne, la classe ouvrière et le patronat échangent pour faire ensuite adopter par la sphère politique et étatique leurs intérêts", explique à Europe1.fr Stéphane Rozès, président de Cap (conseils, analyse et perspectives). La social-démocratie est très en vogue dans les pays du Nord de l'Europe.
Oui, François Hollande est en théorie compatible avec la social-démocratie. La grande négociation voulue par le chef de l'Etat sur le marché du travail, entre tous les partenaires sociaux, entre bien dans ce cadre-là. "A la fin de l'année, les partenaires sociaux peuvent trouver ce compromis historique : protéger mieux les salariés, permettre aux entreprises d'être d'une certaine façon elles aussi protégées", a ainsi martelé le chef de l’Etat dimanche. "Il se place là plus dans une tradition nordique", avec pour modèle l'Allemagne de Schröder, confirme Stéphane Rozès.La social-démocratie implique aussi une volonté réformatrice, que François Hollande martèle depuis de longs mois. Le chef de l’Etat se dit aussi soucieux de préserver les finances publiques, et est favorable à une plus grande régulation de l’économie. De la social-démocratie pur jus.
Et en pratique ? Difficile, voire impossible. En un une phrase dimanche soir, François Hollande a "plombé" tout virage social-démocrate. "En disant que si les partenaires sociaux n’arrivaient pas à un accord à l’issue de la Grande conférence sociale, l’Etat trancherait, François Hollande a montré qu’en France, la social-démocratie restait un mythe", juge Stéphane Rozès. "Il y a clairement une prévalence du politique sur la démocratie sociale", résume le président de Cap. En outre, dans l’Hexagone, le dialogue social est souvent compliqué. "Les syndicats et le patronat sont traditionnellement dans la conflictualité, ce qui empêche tout dialogue social constructif", analyse Stéphane Rozès. "En France, la social-démocratie est un mythe. A mon avis, elle ne se mettra jamais en place dans notre pays", tranche même Stéphane Rozès.