Il faut le reconnaître, François Hollande et Manuel Valls ont surpris leur monde en annonçant la démission du gouvernement, lundi matin, et la formation d'une nouvelle équipe dès le lendemain. Une mesure radicale, décidée moins de 24 heures après les critiques d'Arnaud Montebourg à l'encontre de la ligne politique de l'exécutif. L'analyse d'Olivier Duhamel, professeur de droit constitutionnel et éditorialiste pour Europe 1.
La démission du gouvernement a pris tout le monde de court. Est-ce que cet effet de surprise était recherché ?
L'histoire nous démontre en effet l'ampleur de l'accélération. Cette séquence rappelle la crise politique de 1976, lorsque Valéry Giscard d'Estaing était président et que Jacques Chirac, patron d'une grande fraction de la majorité, a démissionné de Matignon. C'était 38 ans, jour pour jour, avant la démission du gouvernement intervenue hier. Mais en réalité, à l'époque, Chirac n'a pas démissionné du jour au lendemain : sa décision était actée depuis un mois. Depuis, le délai pour former un nouveau gouvernement est donc passé d'un mois à 24 heures ! C'est la conséquence de l'accélération du temps politique et médiatique, mais aussi de l'ampleur des échecs économiques et sociaux de l'exécutif.
Un tel scénario est-il inédit dans l'histoire de la Ve République ?
Des ministres qui ont claqué la porte, cela s'est déjà vu : Michel Rocard lorsqu'il était ministre de l'Agriculture en 1985, Jean-Pierre Chevènement lorsqu'il était ministre de la Défense et s'est opposé à l'intervention en Irak en 1991… Mais dans le cas d'Arnaud Montebourg, et contrairement à ce qu'il veut laisser croire, il s'agit d'une révocation plus que d'une démission.
Au-delà de son cas personnel, on va assister à un rétrécissement politique de la majorité. Cela aussi s'est déjà produit. Ainsi, entre 1976 et 1981, le Premier ministre Raymond Barre a subi une guérilla permanente au sein même de la droite, venant du RPR de Chirac après la démission de celui-ci. Aujourd'hui, la fronde à gauche est loin d'égaler cet épisode. Mais le bémol, c'est l'impopularité du pouvoir, qui est bien plus grande qu'à l'époque.
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Certains évoquent une dissolution. Est-ce une solution envisageable pour Hollande ?
Non, parce qu'elle serait totalement suicidaire. En revanche, on peut s'attendre à un recours accru au vote bloqué ou à l'article 49-3 (qui permettent au gouvernement d'imposer un texte aux députés, NDLR). Ces armes de la Ve République, on n'a pas fini de les voir. C'est pour cela qu'il est absurde de parler de "crise de régime", comme le font Le Figaro et Libération.
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