A sa prise de fonctions, il avait commencé par faire le grand ménage dans la police. Aujourd'hui, Manuel Valls s'attaque à la politique menée par son prédécesseur place Beauvau. Le ministre de l'Intérieur souhaite se démarquer de la politique menée par Claude Guéant en matière d'immigration. Mercredi, devant la commission des Lois du Sénat, le premier flic de France a donc annoncé un sérieux détricotage des mesures "Guéant".
Les naturalisations ? Le "parcours du combattant"
Le ministre a d'abord fait part de sa décision de ne pas appliquer les nouveaux critères de naturalisation voulus par le précédent gouvernement. Des critères "introduits subrepticement" et qui relèvent, selon lui, d'une "course d'obstacles aléatoire et discriminante".
Dans la ligne de mire de Manuel Valls : le très controversé test de connaissance de la culture et de l'histoire de la France, qui devait rentrer en application le 1er juillet. "Des ministres et des sénateurs auraient du mal à y répondre tellement il est hors des clous", a-t-il plaidé, raillant au passage un QCM qui "ressemble à un jeu télévisé".
La philosophie de Manuel Valls en matière d'immigration est la suivante : faire en sorte que la "naturalisation" ne soit "plus vécue, ou perçue, comme la fin d'un parcours du combattant, mais comme l'issue d'un processus d'intégration qui a sa part d'exigences". Pointant du doigt la "politique délibérée" du précédent gouvernement "d'exclure de la nationalité des gens méritants et ne posant aucune difficulté", le ministre a tiré la sonnette d'alarme : "le nombre de naturalisations est en chute libre" et "si rien n'est fait, ce nombre va chuter de 40% entre 2011 et 2012 après une chute de 30% entre 2010 et 2011", a-t-il prévenu.
Des critères de régularisation mieux définis
Sur le chapitre des régularisations, Manuel Valls concertera dès cet été les associations et les syndicats sur les critères des sans-papiers. Pas question d'en "augmenter le nombre" par rapport à ce qui s'est fait sous la droite, mais le ministre tient là aussi à remettre à plat la politique de la droite. "Sur les 30.000 régularisations annuelles effectuées sous le précédent gouvernement, il y en avait "15.000 purement discrétionnaires", a-t-il relevé. Exit ainsi le pouvoir discrétionnaire de l'administration en matière de régularisations. Une circulaire est d'ailleurs en préparation pour redéfinir ces critères "d'admission exceptionnelle au séjour".
Dans le cadre d'un projet de loi prévu pour le premier semestre de 2013, il proposera également de créer un titre de séjour pluriannuel pour faciliter les démarches administratives des étrangers en situation régulière.De 50.000 à 60.000 personnes pourraient bénéficier de cette mesure.
Enfin, un projet de loi présenté à l'automne va "mettre fin au 'délit de solidarité'. Celui-ci permet de poursuivre l'aide désintéressée apportée à des étrangers en situation irrégulière, sur la même base juridique utilisée pour les filières criminelles d'immigration". Des militants associatifs, notamment dans le Pas-de-Calais, ont ainsi été poursuivis en justice pour avoir porté assistance à des sans-papiers.
Roms : de nouveaux démantèlements
Le socialiste, qui juge "pénible" d'être sans cesse comparé Nicolas Sarkozy, a au passage écarté l'hypothèse d'un rétablissement du contrôle aux frontières pour lutter contre une "Europe passoire". Un souhait exprimé par le candidat de l'UMP lors de la campagne présidentielle. Manuel Valls a rappelé son attachement "au principe de libre circulation" et "à la préservation de l'acquis Schengen", rejetant une "fermeture unilatérale des frontières".
En revanche, il y a une politique sur laquelle le nouveau locataire de la place Beauvau n'entend pas revenir : le démantèlement des camps de Roms. Manuel Valls s'est dit "très inquiet" de la concentration de ces populations dans des campements insalubres et illégaux. Une situation qui contraint d'après lui le gouvernement à de nouveaux démantèlements.