Alors que l’enquête avance dans le dossier Karachi, dans lequel deux proches de Nicolas Sarkozy sont dans le collimateur de la justice, les réactions politiques sont vives. Après la mise en examen de Thierry Gaubert, ancien conseiller de l'actuel chef de l'Etat, et la garde à vue de Nicolas Bazire, qui a été témoin à son mariage, François Hollande a dénoncé l'existence d’un "cabinet noir de l’Elysée", lors d’un discours prononcé mercredi à Nantes.
"Les affaires qui reviennent, ces intermédiaires que l’on découvre, ces mallettes qui auraient circulé, ces personnes entendues par la justice, qui révèlent des systèmes de financement qu’on pensait depuis longtemps éloignés de la vie politique", a-t-il commenté.
"Cela abîme la République"
Selon le favori de la course à la candidature à gauche, « cette découverte qu’il existerait une sorte de cabinet noir de l’Elysée, qui ferait pression sur les juges, cela abîme la République (..) Tout cela éloigne de l’enjeu démocratique".
François Hollande a ensuite promis de "sortir" de ce système : "il faudra en sortir après 2012 (…) je ne veux rien dire sur le plan judiciaire, rien dire qui puisse être interprété comme une condamnation avant l'heure", a-t-il continué avant de lancer que "ce climat, le règne des intermédiaires, les commissions, c'est tout ce que nous devons proscrire pour l'avenir".
Son coordinateur de campagne, Pierre Moscovici a, lui, affirmé qu’ »il faudra bien" que le président "s'explique". "C'est en train de devenir une affaire d'Etat politico-financière", a-t-il estimé jeudi sur Canal +.
"Que la justice aille jusqu’au bout"
De son côté, Martine Aubry a demandé mercredi que la justice "aille jusqu'au bout" de l'affaire de financement présumé occulte de la campagne présidentielle d'Edouard Balladur en 1995. "Jamais rien ne doit être mis sous le tapis. C'est peut-être là l'une des affaires les plus graves de la Ve République", a-t-elle commenté dans l'émission Questions d'Info, sur LCP et France Info.
La candidate à la primaire voit dans ce dossier "des personnages un peu douteux, qui sont toujours là. Qu'est-ce qu'ils font exactement? Qu'on nous le dise!", a-t-elle réclamé. "Les Français ont besoin de savoir, de comprendre et ces pratiques dans la République, ce n'est plus possible", a-t-elle ajouté.
Cazeneuve "pas vraiment surpris"
Bernard Cazeneuve, député-maire PS de Cherbourg et rapporteur de la mission d’information de l’Assemblée nationale sur l’attentat de Karachi a affirmé jeudi sur Europe 1 qu'il n'est "pas vraiment surpris" par les derniers rebondissements. "Lorsque nous avons auditionné un certain nombre de personnalités issues de l’administration ou de l’industrie, j’ai vite compris qu’il y avait autour de ce contrat (une vente de sous-marins au Pakistan dans les années 90, ndlr) des questions que Matignon ne pouvait pas ignorer", a-t-il poursuivi.
Il témoigne des difficultés qu'il a eues à enquêter. "J’ai vu dans le silence des acteurs que nous avons auditionnées des informations aussi intéressantes que s’ils avaient parlé", raconte-t-il. "Ils n’avaient pas intérêt à parler (…) car les infos dont ils disposaient étaient indicibles, sauf à se mettre en cause eux-mêmes".
"Généralement, on dispose d’un minimum d’informations pour faire notre enquête, mais là nous n’avons rien obtenu, à part une revue de presse", se souvient-il. " Même Christine Lagarde, à l’époque, a refusé que ses collaborateurs soient auditionnés par l’Assemblée. On n'a jamais vu ça".