André Yché, le président de la Société nationale immobilière (SNI), est un homme puissant. Sous sa houlette, ce ne sont pas moins de 275.000 logements sociaux ou intermédiaires qui sont gérés, un chiffre qui en fait, de très loin, le numéro un du secteur. Mais André Yché est aussi un homme qui, de par sa fonction, dépend du bon vouloir du pouvoir en place. Nommé par la gauche en 1999, mais plus sarkozyste que Sarkozy sous l’ancien président, l’homme craignait pour sa place, avec le retour de la gauche aux affaires. Alors André Yché a pris ses précautions. Libération révèle lundi qu’il a embauché le fils de Jean-Yves Le Drian, le ministre de la Défense, à un poste très élevé. Le quotidien y voit une garantie pour rester en place. Une sorte de caution solidaire…
Un CV limité, mais un poste haut placé. A 29 ans, Thomas Le Drian obtient un poste très haut placé dans une société générant tout de même 1,3 milliard d’euros de revenus par an, via les loyers perçus, selon Libération. Le fils du ministre de la Défense est depuis début janvier "chargé de mission après du président du directoire" (André Yché, ndlr) et "directeur du contrôle de gestion d’Efidis", l’une des sociétés affiliées à la SNI. En outre, il siège désormais, avec 12 autres membres seulement, au Comex (comité exécutif) de la SNI. "Ça rappelle un peu la tentative avortée de placer le fils Sarkozy à) l’Epad", commente, amer, un haut cadre de la société, dans Libération.
L’amertume est d’autant plus grande que Thomas Le Drian ne présente pas un CV à faire pâlir de jalousie ses nouveaux collègues. Selon le quotidien, il est diplômé de SCI Paris, une "école de commerce de réputation moyenne". L’établissement figure à la 16e place du classement établi pour 2014 par le magazine Challenges. Le fils du ministre de la Défense a ensuite travaillé pour diverses sociétés, avant d’intégrer la Caisse des dépôts, en tant que conseiller du directeur général. Selon une porte-parole de la SNI, la seule qui a bien voulu répondre à Libération, c’est cette dernière fonction qui justifie sa nouvelle nomination à la SNI, car, assure-t-elle, Thomas Le Drian y a "travaillé (pendant plu d'un an) à la constitution d’une communauté du logement". L'expérience est légère donc, mais ce sont les raisons qui ont poussé André Yché à l'embaucher qui suscitent le doute.
Yché, homme de réseaux. Le CV d’André Yché est en revanche bien fourni. L’homme a longtemps travaillé dans l’armée avant de devenir, en 1997, directeur adjoint du cabinet d’Alain Richard, ministre socialiste de la Défense. En 1999, il est finalement nommé à son actuelle place de président du directoire de la SNI. Mais quand la droite revient au pouvoir, l’homme s’adapte. Au point d’adhérer totalement à la vision libérale du président Sarkozy sur les logements sociaux, et de même faire du zèle sur le sujet. C’est d’ailleurs ce que lui reprochent, selon Libération, de nombreux élus socialistes et des connaisseurs du milieu HLM : d’avoir "fait avancer l’idée d’une marchandisation du logement social".
Alors avec l’arrivée de François Hollande et de la gauche au pouvoir, son temps à la tête de la SNI semblait compté. C’était sans compter sur le sens du réseau d’André Yché. Pour Libération, le recrutement de Thomas Le Drian fait bel et bien partie d’une stratégie destinée à garder sa place. Le quotidien rappelle par ailleurs que l’homme a reçu en juillet dernier l’ordre du Mérite. Et le ministre qui lui a remis personnellement n’était autre qu’un certain Jean-Yves Le Drian.
INTERVIEW E1 - Le Drian défend le Rafale