Nicolas Sarkozy a été élu samedi président de l'UMP. Mais en tant qu'ancien chef de l'Etat, il bénéficie toujours d'une indemnité et d'un certain nombre de privilèges financés par le contribuable. Une situation dénoncée par plusieurs députés socialistes dans une tribune publiée mardi sur Le Plus. Mais le camp Sarkozy assume, et met en avant son "statut à part" ainsi que le "respect des institutions".
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Le contribuable, "complice" de son retour ? La critique est venue de cinq députés de l'aile gauche du PS, menés par Yann Galut. "Au nom de quoi le contribuable français doit-il être le complice du retour caricatural du chef en manque de reconnaissance et d’actions ?", taclent-ils. "Arrêtons là la schizophrénie 'délirante' : l’ancien président doit devenir pleinement et uniquement candidat".
Michel Sapin leur a emboîté le pas, mercredi sur Canal+. "Je pense qu'il doit y renoncer", a affirmé le ministre du Travail (photo) à propos des avantages de l'ancien président. "Il était président de la République, il est maintenant président d'un parti politique. Il doit donc avoir tous les attributs d'un président d'un parti politique, mais pas ceux d'un ancien président de la République".
Indemnité, collaborateurs, transports… Depuis sa défaite de 2012, Nicolas Sarkozy bénéficie des avantages accordés à tout ancien chef de l'Etat. D'abord, une indemnité mensuelle de 6.000 euros bruts, prévue par une loi de 1955. Mais aussi un certain nombre de privilèges en nature : un appartement de fonction, deux agents de sécurité, sept collaborateurs, une voiture avec deux chauffeurs, ou encore des voyages illimités sur Air France et la SNCF.
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"Ces avantages sont listés dans une lettre de 1985, signée du Premier ministre de l'époque, Laurent Fabius, répondant à une demande de Valéry Giscard d'Estaing", explique à Europe 1 le député socialiste René Dosière (photo), spécialiste des comptes publics. L'élu estime ainsi que chaque ancien président coûte aux contribuables "entre 1,5 et 2 millions d'euros par an".
"Un statut à part". Mais Nicolas Sarkozy ne compte aucunement renoncer à ses privilèges de retraité de l'Elysée. "Quels que soient ses choix personnels, Nicolas Sarkozy reste ancien président de la République et le restera toujours", argue-t-on dans son entourage. "Il doit avoir un statut à part, et ce statut lui donne des droits et des devoirs. C'est aussi une question de respect de nos institutions".
Par ailleurs, l'UMP ne versera aucun salaire à Nicolas Sarkozy, précise-t-on, en rappelant par ailleurs que l'ex-président ne siège plus au Conseil constitutionnel, dont il est membre de droit, et ne touche donc pas d'indemnités à ce titre.
Le précédent Giscard. Dans le camp Sarkozy, on rappelle aussi le précédent de Valéry Giscard d'Estaing. Battu à la présidentielle de 1981, ce dernier avait tenté un retour dans la vie politique. En 1988, il avait été élu président de l'UDF, et se retrouvait donc à la fois ancien chef de l'Etat et dirigeant d'un parti politique - comme Nicolas Sarkozy aujourd'hui.
"A l'époque, ça n'a pas du tout fait polémique", affirme le journaliste Jean-Marc Philibert, auteur de L'argent de nos présidents (Max Milo). "D'abord parce qu'on ne connaissait pas du tout ces avantages, c'était tabou. Et d'autre part, la fonction de président était beaucoup plus respectée".
Une double casquette. Entre argent de l'UMP et moyens de l'Etat, comment Nicolas Sarkozy va-t-il s'organiser ? Son entourage assure qu'il distinguera les "deux casquettes". "Par exemple, lorsqu'il aura des rendez-vous politiques, il se rendra au siège de l'UMP. Mais dans le cadre d'obligations d'ancien président, il utilisera son bureau". La polémique n'a donc pas lieu d'être, assure-t-on : "il n'y a rien de nouveau. Nous avons été transparents sur ce point pendant les deux mois de campagne pour l'UMP".
Ce n'est pas l'avis du député René Dosière. "Nicolas Sarkozy, c'est le mélange des genres permanent. Les moyens de l'Etat ne sont pas prévus pour qu'il mène campagne", critique-t-il. Plus généralement, "le comportement de Nicolas Sarkozy pose la question de la façon dont on traite les anciens présidents", estime René Dosière, qui appelle à mieux encadrer juridiquement les privilèges dont bénéficient les "ex" de l'Elysée.
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