La "frontière", "eldorado" des candidats ?

"Je veux mettre les frontières au cœur de la politique parce que je veux une Europe qui protège et non une Europe qui expose", a affirmé Nicolas Sarkozy.
"Je veux mettre les frontières au cœur de la politique parce que je veux une Europe qui protège et non une Europe qui expose", a affirmé Nicolas Sarkozy. © REUTERS
  • Copié
, modifié à
Ce thème familier des campagnes électorales américaines est repris par Hollande et Sarkozy.

Primaires, porte-à-porte, stratégie web, la campagne présidentielle française n'aura jamais été aussi "américaine". Dernière référence importée du pays de l'Oncle Sam : la "frontière". Thème récurrent de l'histoire politique outre-Atlantique, la "Nouvelle Frontière" (New Frontier) a été immortalisée par John Fitzgerald Kennedy dans son célèbre discours (New Frontier) prononcé le 15 juillet 1960 à Los Angeles. Un terme repris un demi-siècle plus tard par les deux finalistes de la présidentielle française. Mais dans la bouche des deux candidats "made in France", le mot "frontière" n'a pas forcément le même sens.

"Les nouvelles frontières de la civilisation du 21e siècle"

"Je veux mettre les frontières au cœur de la politique parce que je veux une Europe qui protège et non une Europe qui expose". S'appliquant à donner de la hauteur à sa stratégie de reconquête des 6 millions d'électeurs frontistes du premier tour, Nicolas Sarkozy a prononcé dimanche, à Toulouse, une ode aux frontières protectrices de la civilisation et de la société françaises et européennes. Le candidat de l'UMP a souhaité incarner "les nouvelles frontières de la civilisation du 21e siècle", et déploré l'effacement des frontières  politiques, économiques, culturelles et morales, responsable selon lui du "désordre du monde" et des crises de ces dernières années.   

"Parce que je ne veux pas d'un monde où tout se vaut, où il n'y a pas de limite, plus de repères", a-t-il expliqué, en exaltant le "sentiment national" et la "fierté" d'être français.

Aux Etats-Unis, "un terme d'ouverture"

Sarkozy-JFK, même combat ? Pas vraiment, souligne Nicole Bacharan interrogée par Europe1.fr. "Le terme 'frontière' est très présent dans l'histoire américaine mais dans un sens un peu opposé" à celui employé par le candidat UMP, sourit la spécialiste des Etats-Unis. De l'autre côté de l'Atlantique, "c'est un terme d'ouverture. Ça veut dire un plus large horizon, le prochain défi", même si au départ, ce terme n'a pas été utilisé de manière "aussi sympathique", explique Nicole Bacharan.

 Au 19e siècle, il était en effet question d'une frontière "horizontale". "Il s'agissait de repousser les Indiens", précise la politologue. En 1960, JFK reprend cette expression pour lui donner un autre sens. Dans un discours à la fois "social" et de conquête de l'espace. Le futur président américain se réfère cette fois-ci à une frontière plus "verticale".

"La France n'a jamais été sans frontières"

C'est dans la veine du discours de John F. Kennedy que François Hollande a repris le terme de "frontière" à Vincennes, le 15 avril. Devant des dizaines de milliers de sympathisants agitant des drapeaux tricolores, le candidat socialiste a affirmé vouloir "fixer une nouvelle frontière pour une nouvelle France". "Il ne suffit pas de récuser", de "condamner un bilan", a alors martelé François Hollande avant d'ajouter : "il faut distribuer une nouvelle donne, fixer une nouvelle frontière pour une nouvelle France".

Interrogé lundi sur le discours de son rival de l'UMP dimanche à Toulouse, François Hollande s'est d'ailleurs montré réservé sur le sujet : "je ne pense pas que la frontière soit le sujet principal de l'élection présidentielle", a-t-il estimé sur Europe 1.

Accusant le président-candidat d'être responsable des problèmes qui peuvent se poser autour de la question, le leader socialiste a souligné que "la France n'a jamais été sans frontières".