D’abord confiant, ensuite inquiet, enfin satisfait… Le sommet de Bruxelles a été riche en émotions pour François Hollande. Le chef de l’Etat, arrivé jeudi dans la capitale belge fort du soutien de l’Espagne et de l’Italie, a pu craindre un camouflet quand ses deux alliés l’ont quelque peu lâché, au milieu de la nuit. Mais l’annonce au petit matin d’un accord comprenant notamment un pacte de croissance lui a finalement rendu le sourire.
Les exigences de Monti
Ce pacte de croissance, initiative française, l’Italien Monti et l’Espagnol Rajoy avaient promis de le soutenir face aux partenaires européens plus sceptiques, particulièrement l’Allemagne. Mais aux environ de 23 heures, le président du conseil italien, très au fait du fonctionnement des institutions européennes, pose ses exigences, avec l’appui du Premier ministre espagnol. Les deux dirigeants menacent de ne pas adopter le pacte de croissance si des mesures d’urgence visant à alléger la pression des marchés sur Madrid et Rome ne sont pas d’abord entérinées.
Panique à Bruxelles. Agacé, le président de l’Union, Herman van Rompuy, si confiant quelques heures plus tôt sur l’imminence d’un accord, est contraint de rétropédaler. Et tous comprennent que la nuit va être longue.
Hollande embarrassé mais beau joueur
A ce moment-là, la victoire personnelle sur laquelle compte tant François Hollande avec le volet croissance qu’il promeut depuis de longs mois, est désormais menacée. D’autant que le coup est venu de Mario Monti, plus fidèle allié de François Hollande sur la scène européenne. Sur le coup, face à la presse, le président français, un brin embarrassé tout de même, se montre beau joueur. "M. Monti comme M.Rajoy m’avaient prévenu de leur position", a-t-il affirmé. "Je les comprends, ils ne pouvaient pas se contenter d’un accord partiel. Je connais leurs difficultés".
Quant à la méthode employée, François Hollande refuse de la condamner. "Chantage ? Je ne crois pas que ce soit le mot. Ce n'est pas la méthode de Mario Monti ni, pour autant que je sache, celle de Mariano Rajoy", a-t-il commenté. N’empêche. A ce moment-là, François Hollande joue gros. Il retourne alors à la table des négociations.
"Déjà des effets heureux"
Et c’est finalement peu avant cinq heures du matin qu’un accord est conclu. L’Espagne et l’Italie en sont les grands vainqueurs, alors que l’Allemagne est celle qui a cédé le plus de terrain. Quant à la France, elle est restée un peu en retrait, mais a rempli son objectif prioritaire : le pacte de croissance, de l’ordre de 120 milliard d’euros, est adopté.
C’est donc un François Hollande satisfait qui s’est présenté devant la presse vendredi matin, avant d’entamer la seconde journée de ce sommet de Bruxelles. "Ces premières annonces ont déjà eu des effets heureux", s'est félicité le chef de l'Etat français, probablement en référence à l’envolée des marchés européens observée dès l’ouverture des bourses. "Nous avons bougé tous ensemble", s’est-t-il félicité. Avant d’ajouter : "la meilleure façon de faire bouger les autres, c'est de bouger soi-même".
Forcément, l'analyse de l'opposition n'est pas la même. "Je pense que c'est un petit pas en avant", a ainsi déclaré Alain Juppé sur France Info. "Il y a encore beaucoup à faire pour progresser vers une véritable union bancaire, une véritable union budgétaire, politique", a-t-il dit déplorant que la France soit "très en recul par rapport aux initiatives que prennent soit le président de l'eurogroupe, le président de la commission (européenne) ou l'Allemagne", a jugé l'ex-ministre des Affaires étrangères.