Petit retour en arrière. A l’automne 2011, le Parti socialiste tient sa première grande primaire citoyenne, visant à désigner le candidat à la présidence de la République. A l’époque, le processus avait largement été raillé par l’UMP. Un an et demi plus tard, l’ancien parti majoritaire s’est converti et a annoncé jeudi soir la tenue d'une primaire pour les élections municipales 2014 à Paris. Et les critiques d’hier semblent avoir été oubliées, tant les modalités choisies par l’UMP rappellent celles du PS.
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• "Une opération de fichage politique."
Ce qu’ils disaient. Sans conteste, ce fut l’argument le plus souvent utilisé par l’UMP pour descendre en flèche la primaire socialiste. "Avec ces primaires, le PS est en train de créer un gigantesque fichage politique", expliquait au JDD Jean-François Copé en juin 2011. "Dans les villes socialistes, vous imaginez les conséquences pour les agents municipaux ou les présidents d'association qui ont des subventions, s'ils ne participent pas à cette parodie d'élection?", interrogeait-il. La polémique avait même gagné la très solennelle Assemblée nationale, où Claude Guéant avait, au micro, dénoncer un problème grave car la primaire revient à publier une liste de l’opinion politique des Français."
Ce qu’ils font. Pour participer à la primaire UMP à Paris, il faudra remplir deux conditions : être inscrit sur les listes électorales de la capitale, et surtout s’inscrire préalablement du 15 avril au 10 mai sur un site dédié, moyennant 3 euros. Or, qui dit inscription en ligne dit renseignement, au minimum, de l’adresse mail, voire de l’adresse ou du numéro de téléphone. Bref, un matériau potentiellement très intéressant pour l’UMP. "Le Parti socialiste aurait éventuellement pu se servir de fichiers pour la présidentielle, mais là, on est dans le cadre d’une municipale donc l’enjeu est moindre", minimise Antoine Rufenacht, président de l’instance chargée de surveiller la primaire UMP, joint par Europe1.fr.
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• "Une machine à s’auto-détruire."
Ce qu’ils disaient. L’UMP n’a pas manqué de gausser les dissensions entre les candidats à la primaire socialiste. Le PS "s’auto-détruit par des haines inouïes entre personnes à travers les primaires. Les primaires, c’est une machine à s’auto-détruire", avait jugé Jean-François Copé sur Europe 1 en avril 2011.
(A partir de 10’20)
Ce qu’ils ont fait. Depuis la validation du choix de la primaire, le président de l'UMP a forcément changé de fusil d’épaule, lui qui estime désormais que l’organisation des primaires, doit, selon lui, créer "les conditions d’une grande vague bleue". Mais c’est bien Nathalie Kosciusko-Morizet, candidate et favorite dans ces primaires parisiennes, qui tranche le plus avec le discours de l’automne 2011 en vouge à l'UMP. "Les primaires permettent aussi de rassembler, et je crois que l’on a besoin, dans la capitale, de rassemblement. Je ne suis pas là pour casser, pour construire." Reste à savoir si ses belles intentions résisteront à un débat que l’on annonce très tendu à droite. Quelques déclarations laissent craindre le pire.
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• "Une consultation privée, pas une élection"
Lors de la primaire socialiste, l’UMP s’était attaché à minimiser la portée du vote. Et ce malgré une mobilisation inattendue, avec entre 1,5 et 2,5 millions d’électeurs. "Une consultation privée, aussi grande soit-elle, ne fait pas une consultation. C'est en 2012 que l'élection présidentielle aura lieu, pas en octobre 2011", répétaient à l’envi les caciques de l’UMP, suivant les consignes d’un document internet que lemonde.fr avait publié. Autre refrain : la mobilisation tout relative. "Quatre Français sur 100" ont voté à ce scrutin. "Ca fait 96% des Français qui pensent que l'élection, c'est l'année prochaine, voilà. Donc, je crois qu'il faut peut-être relativiser un peu tout ça", avait réagi le président de l’UMP, dans une démonstration surprenante
Ce qu’ils font. Evidemment, le discours a changé. Et la décision d’organiser des primaires ouvertes à tous les citoyens n’est évidemment pas anodine. L’objectif sera de mobiliser au maximum pour asseoir la légitime du ou de la candidate. Au risque de voir l’’argument des 4% revenir en pleine face de l’UMP. Pour éviter cet écueil, considérant que Paris compte, 2,2 millions d’habitants, il faudra réunir au moins 88.000 électeurs pour faire mieux que le PS en termes de proportions. Le défi est lancé.