Vivement commenté en Allemagne, le duo Sarkozy-Merkel suscite aussi des réactions en cascade de ce côté-ci du Rhin.
Dans les rangs de la majorité, personne ne trouve rien à redire. François Fillon a ainsi jugé "normal qu'Angela Merkel défende ses idées et ses convictions politiques. Il est normal qu'elle apporte son soutien à Nicolas Sarkozy". Le président de l'Assemblée nationale, Bernard Accoyer y voit, lui, "le signe d'une démocratie commune" entre pays de l'Union européenne.
Seul le conseiller spécial du chef de l'Etat, Henri Guaino, a émis quelques réserves mardi matin sur Europe1 : qu'Angela Merkel entre "dans le débat public sur tout ce qui concerne l'Europe, les rapports entre la France et l'Allemagne, je trouve cela tout à fait légitime… dans la campagne présidentielle elle-même, je suis plus réservé".
Un "mélange des genres anormal"
Du côté du MoDem, Yann Wehrling dénonce un "mélange des genres anormal" et "une erreur de jugement" du chef de l'Etat français. "On nous fait une blague en nous expliquant qu'il s'agit d'un sommet franco-allemand alors que c'est un chef de parti allemand qui vient soutenir un autre chef de parti, candidat en France", a résumé mardi l'ex-leader des Verts passé au MoDem. "Cela pose un problème d'utiliser ses fonctions et les moyens de ses fonctions pour faire une campagne déguisée en France", a insisté le leader centriste.
Mardi soir, sur TF1, François Bayrou a dénoncé : "il ne peut pas y avoir un candidat à la présidentielle soutenu officiellement par l'Allemagne". "Qu'un parti étranger soutienne un candidat, soit, mais la chancelière allemande n'a pas à se prononcer pour tel ou tel candidat dans le cadre d'une visite officielle", a-t-il plaidé.
"C'était la professeur et son élève"
Les socialistes, Ségolène Royal en tête, ont préféré verser dans l'ironie. "Ce n'était pas très positif, pas très valorisant pour lui. Il avait l'air d'être sous tutelle" de la chancelière allemande, a ainsi raillé Ségolène Royal mardi matin selon Le Parisien. "C'était la professeur et son élève. D'ailleurs, aujourd'hui, il aurait une mauvaise note. Il aurait eu un zéro pointé !", s'est encore moqué l'ancienne candidate socialiste à la présidentielle en faisant allusion aux difficultés de l'économie française.
Plus grave, Pierre Moscovici, le directeur de campagne de François Hollande, a appelé la chancelière à ne pas compromettre l'avenir de l'amitié franco-allemande en soutenant Nicolas Sarkozy. "L'amitié franco-allemande, c'est un bien commun qui ne doit pas être abîmé par des amitiés partisanes", a-t-il dit. "Madame Merkel, en tant que chancelière - je ne parle pas là de la chef conservatrice - doit savoir qu'il y a une possibilité sérieuse, forte, que son prochain interlocuteur ne soit plus Nicolas Sarkozy mais François Hollande. Bref, n'insultons pas l'avenir", a ajouté l'ancien ministre sur France Info.
Une rencontre Hollande-Merkel ?
Le conseiller spécial du candidat socialiste, Jean-Marc Ayrault, espère toujours une rencontre Hollande-Merkel. La chancelière n'avait-elle pas reçu la candidate Ségolène Royal en 2007 ? "Je pense que ce serait utile qu'elle le reçoive pour discuter", a-t-il plaidé sur RTL. Lors de son interview télévisée avec Nicolas Sarkozy lundi soir, la chancelière a refusé de dire si ce serait le cas. Le député-maire de Nantes rêve à un tandem dans la lignée de celui François Mitterrand et Helmut Kohl. "C'est vraiment pour moi la référence : deux politiques, l'un socialiste, l'autre conservateur, et qui ont créé un élan en Europe, qui ont pris des décisions à l'échelle de l'Histoire", a dit Jean-Marc Ayrault.
Qu'en dit l'intéressé ? Lundi, le candidat socialiste s'est contenté d'une boutade sur le tandem "Merkozy". "Si Madame Merkel veut faire campagne pour Nicolas Sarkozy, elle a parfaitement le droit. Si Nicolas Sarkozy veut que Madame Merkel participe à des meetings, puisqu'il est candidat, il a parfaitement le droit", a-t-il ironisé. Berlin serait la première destination du "Président Hollande" en cas de victoire le 6 mai.