L'hommage appuyé de Marine Le Pen. "Tout notre respect à Dominique Venner dont le dernier geste, éminemment politique, aura été de tenter de réveiller le peuple de France". Le tweet, signé des initiales MLP, a été posté par la présidente du FN, Marine Le Pen, peu de temps après l'annonce de la mort de Dominique Venner, mardi soir. Cette figure de la pensée d'extrême droite a donné lui-même à son geste une signification politique. Comment expliquer ce soutien appuyé de la présidente du FN ? Eléments de réponse avec le sociologue et spécialiste de l''extrême droite, Sylvain Crépon.
Tout notre respect à Dominique Venner dont le dernier geste, éminemment politique, aura été de tenter de réveiller le peuple de France. MLP— Marine Le Pen (@MLP_officiel) 21 mai 2013
"Le Pen, tout sauf une idéologue". Pour le spécialiste de l'extrême droite, cet hommage de Marine Le Pen est "déroutant", à double titre. D'abord, parce que "Marine Le Pen est tout sauf une idéologue, contrairement, par exemple, à Bruno Gollnisch, qui se présentait comme l'héritier idéologique de Jean-Marie Le Pen", rappelle le sociologue. "Quand Bruno Gollnisch rend hommage à l'essayiste d'extrême droite, voyant dans son geste 'une protestation contre la décadence de notre société', le député européen partage cette vision des choses", estime Sylvain Crépon. L'hommage appuyé de la patronne du FN est "beaucoup moins évident". D'autant plus que Marine Le Pen "n'a eu de cesse de dégager le FN de l'ornière de l'extrême droite", souligne le chercheur, en faisant le pari de la dédiabolisation du parti.
"Flatter l'électorat traditionnel". En prenant la défense de Dominique Venner, personnage à la réputation sulfureuse, "obsédé par la décadence de l'Occident" et qui croyait "en l'inégalité entre les races", Marine Le Pen s'éloigne de sa stratégie de dédiabolisation et fait "souffler le chaud et le froid". Cet hommage appuyé s'adresse clairement "à l'électorat traditionnel du FN", décrypte Sylvain Crépon.
"Une stratégie assez adroite". Pour le chercheur, Marine Le Pen cherche à redéfinir la place du FN en tant que parti politique. "Elle se rend compte aujourd'hui que si elle va trop loin dans la dédiabolisation, elle va faire du FN un parti un peu trop normal", souligne le spécialiste de l'extrême droite. "Stratégiquement, cet appui à Dominique Venner est assez adroit mais sur le fond, cela montre que la marge de manœuvre du FN est assez limité", estime Sylvain Crépon. "Si le parti se radicalise trop, ce sera un manque à gagner électoral ; s'il se normalise trop, le FN risque de devenir un UMP bis et de perdre sa spécificité sur le marché électoral", conclut le sociologue.