LA PHRASE - Lundi soir, le Premier ministre Jean-Marc Ayrault recevait Claude Bartolone et plusieurs responsables parlementaires à Matignon. Objectif de la rencontre : les convaincre du bien fondé d’une intervention militaire en Syrie. Si le président de l’Assemblée nationale s’est dit favorable à la consultation du Parlement, il a bien fait comprendre qu’il n’était pas partisan d’un vote. Claude Bartolone estime qu’en "période de crise", il revient au chef de l’Etat de prendre une telle décision. Et laisse entendre que dans des circonstances similaires, l’actuelle majorité n’a jamais réclamé de vote du Parlement.
>> Dans sa chronique, Laurent Guimier revient sur cette déclaration :
Les archives prouvent le contraire. Le 2 avril 2008, 228 députés socialistes déposent une motion de censure contre le gouvernement Fillon. La cible: Nicolas Sarkozy qui vient de décider de réintégrer la France dans le commandement intégré de l’OTAN sans vote du Parlement. Le Président vient également d’envoyer des troupes en renfort en Afghanistan, signe de "l’alignement" de la France sur les Américains.
Le contexte est donc très similaire à celui qu’on connait aujourd’hui : l’intervention armée est décidée par le Président, et lui seul. Le Parlement est consulté mais ne vote pas. A l’époque, les socialistes évoquent une "humiliation".
La motion de censure doit être défendue. Le 8 avril 2008, c’est François Hollande, alors Premier secrétaire du Parti socialiste qui s’en charge. "Dans toute démocratie digne de ce nom, de telles arbitrages auraient été rendus après un vaste débat et un vote solennel du Parlement", affirme-t-il à la tribune de l’Assemblée nationale. Il conclue son discours en rappelant qu’il "n’appartient pas au Président de la République de décider seul de notre politique étrangère et de défense". Sans surprise, la motion de censure est rejetée.
Ce mardi, François Hollande a estimé que la question d’un vote n’est pas "taboue”. Une façon, sans doute, d'éviter qu'on exhume ce discours de 2008.