A croire que les socialistes avaient sous-estimé un de leurs challengers. Porté par les sondages, qui le donnent quatrième, voire troisième, le candidat du Front de gauche est la surprise de cette campagne présidentielle et se met à rêver. "Je peux passer devant François Hollande. Il y a un mois, personne ne pensait que je pourrais passer devant tous les autres", s'est réjoui le candidat devant les 23.000 personnes venues assister à son meeting à Lille mardi soir. Jean-Luc Mélenchon n'entend d'ailleurs pas plier face au PS, alors que le candidat socialiste cherche à donner un second souffle à sa campagne et appelle à un large rassemblement autour de sa candidature dès le 1er tour. Face à la dynamique Mélenchon, le camp Hollande se divise entre indifférence et volonté de calmer le jeu.
"Ne fermons pas la porte"
La scène est relatée par Le Monde mercredi. Lors du bureau national du PS, qui s'est tenu la veille, le désaccord entre Laurent Fabius et Marie-Noëlle Lienemann est flagrant. L'ex-Premier ministre prône, ce jour-là une stratégie offensive, consistant à attaquer les propositions de Jean-Luc Mélenchon. Le Monde cite notamment les questions de "la régularisation des sans-papiers, la nationalisation de Total ou la tenue d'une assemblée constituante". Réaction immédiate de Marie-Noëlle Lienemann : "Ce n'est pas en tapant sur Jean-Luc qu'on fera progresser le score de François au premier tour".
Interrogée par Publicsenat.fr mercredi, la sénatrice PS, située à la gauche du parti remet le couvert. Réclamant "un nouveau tempo, un nouveau souffle" dans la campagne de François Hollande, celle qui fut avec Jean-Luc Mélenchon et Julien Dray l'animatrice du courant de la gauche socialiste dans les années 90', lance un appel à ses camarades. "Il faudra bien travailler à des convergences avec nos alliés. Ne fermons pas la porte. Il ne s'agit pas d'avoir des tractations derrière les rideaux, mais de préparer des convergences législatives", prévient-elle. L'ex-ministre de Lionel Jospin demande ainsi "une nouvelle étape" menant à un accord avec le Front de gauche.
"Si on soutient Hollande, on approuve son programme"
Des propos qui tranchent avec le discours du député PS Jérôme Cahuzac mardi. Le président de la Commission des finances de l'Assemblée, a provoqué l'ire du candidat du Front de gauche en expliquant, en substance ("dès lors que l'on soutient la candidature de François Hollande, on approuve son programme") que le programme de François Hollande serait à prendre ou à laisser pour Jean-Luc Mélenchon, si celui-ci était devancé par le candidat PS au premier tour.
Une "erreur", juge Marie-Noëlle Lienemann au lendemain des déclarations du socialiste. "Tout ce qui est de nature à entretenir un débat polémique ou de mauvaises relations au sein de la gauche est une erreur". "Notre ami Jérôme Cahuzac aurait mieux fait de ne pas rentrer dans une logique de cette nature", martèle la sénatrice, qui insiste sur un point : "les gestes à faire rendant possible le rassemblement à gauche doivent être faits par François Hollande".
Pour Hollande, le premier tour avant tout
Mais alors le député PS Jean-Christophe Cambadélis estime "plutôt positive" la poussée dans les sondages de Jean-Luc Mélenchon - puisque, selon lui, les électeurs du candidat du Front de gauche "se reporteront certainement" sur François Hollande au second tour - le candidat socialiste a préféré mettre en garde ses futurs électeurs, mercredi matin sur Europe 1.
"Il y a d'abord le premier tout, il est décisif", a insisté François Hollande avant d'ajouter : "nous devons créer la dynamique dès le premier tour. J'appelle tous les électeurs a bien comprendre cette logique. C'est au premier tour que le mouvement se fait".
Prête à exploiter la moindre faille dans le camp socialiste, l'UMP, par la voix de son secrétaire général en a quant à elle profité pour en rajouter une couche mercredi. "La question centrale, c'est de savoir comment François Hollande compte s'y prendre, trouver la cohérence" entre son projet et "son alliance avec Jean-Luc Mélenchon", a commenté avec gourmandise Jean-François Copé (UMP).