En annonçant lundi qu’elle programmait dans le cadre de Mots croisés un grand débat le 16 avril prochain entre les dix candidats ou leur soutien, France 2 a créé pas mal de remous. Les modalités de l’émission ne sont toujours pas définies, mais la pression est forte sur la chaîne publique. Surtout, ce grand débat réclamé à grand bruit par plusieurs prétendants à la présidence de la République, risque fort d’être privé des deux favoris. Face aux difficultés d'organisation du débat à dix, France 2 pourrait finalement tenter de réunir les candidats cinq par cinq en deux soirées la semaine prochaine, évitant ainsi une confrontation Hollande-Sarkozy, selon les informations d'Europe1. Selon le JDD.fr, il y aura au final trois émissions, la spéciale Mots croisés étant maintenue le 16 avril. La chaîne publique n'a souhaité faire "aucun commentaire" mardi soir.
Sans Hollande, avec Le Pen
A l'annonce d'un grand débat le 16 avril, François Hollande a fait savoir qu’il ne se prêterait pas à l’exercice. "Si le débat se tient, il y aura un représentant de François Hollande qui y participera", a déclaré Bruno Le Roux lors d'un point de presse hebdomadaire de l'équipe de campagne du candidat socialiste. "Il faut se mettre d'accord d'abord sur les modalités, (…) on attend d'abord d'en savoir plus", a ajouté le porte-parole de François Hollande, assurant que le président-candidat Nicolas Sarkozy n'avait pas non plus l'intention de participer lui-même à ce débat.
Si pour l’heure le président sortant n’a pas donné sa réponse, celle-ci ne fait guère de doutes. "Le débat, il a lieu pour les deux candidats que les Français auront choisi pour le 2e tour", avait en effet déclaré le chef de l'Etat, interrogé sur la question, vendredi sur BFM-TV.
En revanche, Marine Le Pen, troisième en termes d’intentions de vote dans la plupart des sondages, sera bien de la partie. "J'irai, bien sûr (…), si je suis invitée", a déclaré la candidate du Front national en marge d'une intervention devant la CGPME (petites et moyennes entreprises). "Dans une élection présidentielle qui concerne tout le monde, il n'y a pas un seul débat qui est organisé", a-t-elle déploré.
Les exigences de Bayrou
François Bayrou, de son côté, devrait vraisemblablement participer à cette joute télévisée, lui qui a appelé de ses vœux la tenue d’un tel débat. Sauf que le candidat du MoDem a ses exigences. Lundi soir à Dijon, le centriste a d’abord demandé que le débat se tienne en première mardi de soirée. Mardi, il a réclamé que François Hollande comme Nicolas Sarkozy jouent le jeu. "Autrement, cela n'a aucun sens", a insisté sur Canal Plus François Bayrou, qui ne se berce guère d’illusions : "la vérité, c'est qu'il y a une entente clandestine entre François Hollande et Nicolas Sarkozy (pour) ne pas débattre", a-t-il accusé.
Même son de cloche au Front de gauche. Le directeur de campagne de Jean-Luc Mélenchon, François Delapierre, avait dit lundi que le candidat du Front de gauche irait "si Sarkozy et Hollande" étaient présents, ce qui laisse planer un vrai doute sur sa participation.
Du côté des "petits" candidats, Jacques Cheminade a fait savoir son impatience. "J'attends le débat, je piaffe de les avoir devant moi", a-t-il déclaré lors d'une conférence de presse organisée en marge de sa visite de la centrale nucléaire de Fessenheim, dans le Haut-Rhin. "On va dire : ‘il ne représente rien, ça ne sert à rien de débattre avec lui, on va perdre des voix’, pensent-ils s'ils débattent avec ce ‘chétif insecte’. Ils s'apercevront que je ne suis pas un chétif insecte", a ajouté Jacques Cheminade, crédité de moins de 0,5% des intentions de vote.
Pour l’heure, les autres candidats n’ont pas fait connaître leur intention. Mais la plupart s’étaient déjà prononcés en faveur d’un grand débat, et ils devraient donc s’y rendre. Reste à connaître quelle forme veut donner France 2 à son émission. Car si Mots croisés dure 90 minutes, comme habituellement, cela ne laisse que 9 minutes de parole par candidat. Ou par soutien.