La phrase. "Si vous ne voulez pas me mettre minable, il faut être plus de 100.000". Jean-Luc Mélenchon attend beaucoup de "sa" manifestation de dimanche prochain. L’homme politique de l’année 2012, selon le magazine GQ, veut faire rugir la rue pour "purifier l'atmosphère politique", assurait-il sur France Info début avril. Objectif affiché : "la manifestation est pour un changement de régime, pour en finir avec la monarchie quinquennale, l'irresponsabilité qui permet le règne de l'argent roi et ces gens qui circulent entre les institutions, les grands ministères et les grosses banques et qui sont à l'origine d'un événement comme Cahuzac", a-t-il précisé lundi sur RMC.
Une démonstration de force. Depuis des mois, Jean-Luc Mélenchon flirte avec la ligne jaune, comme quand l'un de ses lieutenants traite Pierre Moscovici de "salopard". Mais l'homme aime à jouer les équilibristes et dimanche encore, il éructera contre la politique "austéritaire" de la majorité. "D'échec, il n'y en aura pas, ce n'est pas possible parce ce que nous sommes en train de faire est une chose inouïe. C'est une manifestation de gauche sous un gouvernement de gauche, contre une politique sociale libérale et pour changer les institutions. C'est énorme, personne n'a jamais fait ça", s’enorgueillit-il déjà.
Des syndicalistes, des militants associatifs, des sympathisants sont annoncés en masse pour ce grand défilé qui ira de la place de la Bastille à la place de la Nation. "Plus d'une centaine de bus" étaient déjà prévus en début de semaine selon Marie-Pierre Vieu, responsable de la coordination nationale du Front de gauche. "Cela s'annonce comme une grande marche", "il y aura beaucoup de monde", prédit lui aussi Pierre Laurent, patron des communistes, dont le parti fournira le gros des troupes mobilisées dimanche.
Un Premier ministre du Front de gauche ? La question pourrait faire sourire tant les lignes politiques des deux camps sont éloignées. Mais un sondage récent du JDD a révélé les envies de gouvernement d’union nationale des Français, et depuis, on sourit moins. Alors, Jean-Luc Mélenchon à Matignon ? "Bien sûr, c'est le but. François Hollande avait une chance de faire quelque chose de bien, il l'a ratée. Il peut se rattraper... Il peut me nommer Premier ministre. Je n'ai pas peur !", avait-il lancé sur Europe 1, le 22 avril.
Un excès d’enthousiasme ? Pas du tout. Depuis cette sortie, "Méluch" n’a de cesse de répéter son objectif : "je sais quoi faire, je suis prêt à démarrer demain matin. Il y a les ministres qu'il faut", a-t-il encore lancé vendredi matin sur BFMTV. Il a d’ailleurs déjà une idée de "son" éventuel gouvernement. Montebourg en ferait partie, à "la place éminente à laquelle il peut aspirer". Eva Joly aura elle aussi droit à son maroquin. "Si je mettais Eva Joly au ministère de la Justice, les paradis fiscaux, dans trois jours, la guerre est commencée", a fanfaronné le patron du Parti de gauche.
Et si lui refusait Matignon, un autre pourrait-il relever le gant ? "Mais moi pourquoi pas", a assuré Pierre Laurent sur i-Télé, vendredi. Jean-Luc Mélenchon reste malgré tout le mieux placé. Selon un sondage CSA pour le Figaro du mercredi 31 avril sur les prétendants au poste de Premier ministre, Manuel Valls arrive en tête avec 28% d'opinions favorables, suivi par Jean-Luc Mélenchon (17%).
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Qui m’aime me suive. Depuis des semaines, Jean-Luc Mélenchon fait de la réclame. Car il le sait, plus les Français seront nombreux, et plus ses critiques seront audibles. Outre le Français lambda, le tribun drague ouvertement plusieurs personnalités politiques. Rassembler, pour mieux peser. "Arnaud Montebourg aurait sa place naturelle le 5 mai avec nous dans la rue", a-t-il estimé vendredi matin, sur BFMTV, car "comme nous, il est pour la VIe République, comme nous, il est contre la finance, comme nous, il n'accepte pas la politique d'austérité".
Eva Joly a aussi assuré qu’elle se mêlerait au cortège, même si Europe Ecologie - les Verts, a condamné sa décision. Olivier Besancenot sera également présent, tout comme, bien sûr, Pierre Laurent et "ses" communistes. Leur venue aurait été un vrai coup politique, mais les représentants de l’aile gauche du PS, Marie-Noëlle Lienemann et Emmanuel Maurel, ne seront pas là. "Qu'est-ce qu'ils veulent vraiment ? Dissoudre l'Assemblée ? Réformer les institutions ? Une VIe République, mais quelle VIe République ? (…) Mélenchon manque de débouchés précis", a tranché la première.