"Il n'y aura pas de fête et d'ailleurs on n'a jamais imaginé faire la fête des un an ni des deux ans, il y aura peut-être la fête des cinq ans", confiait François Hollande au Journal du Dimanche, le week-end dernier. Le 6 mai, jour anniversaire de son élection, l'ambiance sera studieuse. Ni fastes, ni bougies à l'Elysée mais un séminaire de travail avec tout le gouvernement.
Comme François Hollande, ses prédécesseurs Nicolas Sarkozy, Jacques Chirac et François Mitterrand avaient, eux-aussi, cherché à "banaliser" cette journée un peu encombrante qui sonne l'heure du premier bilan. Europe1.fr s'est replongé dans les archives.
6 mai 2008 - SARKOZY, COMME UN AIR DE CAMPAGNE
Le contexte de l'époque :
• Sa cote de popularité : 36% (source Ifop)
• Le taux de chômage : 7,7% (source Insee)
• La croissance : - 0,2% au deuxième trimestre (source Insee)
• La promesse qui se fait attendre : le pouvoir d'achat
• Le débat du moment : la réforme des institutions
L'échec du pouvoir d'achat. Un an après son élection, le chef de l'Etat sait qu'il a fait beaucoup de déçus. 79% des Français estiment que son action n'a pas permis d'améliorer la situation en France. Même si le chômage est en baisse (7,7% en mai 2008 contre 8,5% en mai 2007), Nicolas Sarkozy n'est pas parvenu à devenir le "président du pouvoir d'achat". Lors de ses vœux à la presse, le 11 janvier 2008, il avait avoué sans détour son impuissance : "S'agissant du pouvoir d'achat, qu'est ce que vous attendez de moi, que je vide des caisses qui sont déjà vides ?"
Son image s'est abîmée. Les premiers mois de présidence "bling-bling" et l'affichage de sa vie privée - son divorce avec Cécilia et sa rencontre avec Carla Bruni - ont fortement déplu à l'opinion. Avec une cote de popularité tombée à 36%, Nicolas Sarkozy ne peut plus compter que sur le soutien des sympathisants UMP.
Comment il a vécu son premier anniversaire. Ce 6 mai 2008, Nicolas Sarkozy tient à montrer aux Français qu'il n'est pas dans la célébration mais dans l'action. Le président choisit de passer sa journée avec des ouvriers dans le Gard, pour parler emploi des séniors et retraites. Alors que les médias l'interrogent sur son bilan, Nicolas Sarkozy balaie la question : "Moi mon travail, c'est d'agir", répond t-il aux journalistes.
"Ce ne n'est pas à moi de faire le bilan" :
En ce jour anniversaire, les militants de l'UMP sont réunis salle Gaveau, à Paris, là où leur champion avait prononcé ses premiers mots de président élu. Après avoir laissé planer le doute sur sa venue, Nicolas Sarkozy préférera finalement ne pas s'afficher parmi ses partisans, soucieux d'être perçu comme le président de tous les Français. De retour à Paris après sa visite dans le Gard, le chef de l'Etat fêtera son premier anniversaire en toute discrétion, lors d'un cocktail dînatoire à l'Élysée, avec les membres du gouvernement et leurs conjoints.
Sarkozy est absent, salle Gaveau :
7 mai 1996 - CHIRAC, LE RETOUR AUX SOURCES
Le contexte de l'époque :
• Sa cote de popularité : 37%
• Le taux de chômage : 10,7%
• La croissance : 0,4% au deuxième trimestre
• La promesse qui se fait attendre : la baisse des impôts
• Le débat du moment : la réduction des déficits
Le tournant d'octobre 1995. De 59% de Français satisfaits en mai 1995, la cote de popularité de Jacques Chirac s'effondre à 27 % en novembre, un record à l'époque sous la Ve République. Six mois après son élection, la réduction de la "fracture sociale" et la baisse des impôts promises par le candidat Chirac ne sont plus les priorités du président. Le 26 octobre 1995, lors d'une intervention télévisée, le chef de l'Etat reconnaît avoir "sous-estimé l'ampleur du problème". L'heure est à la rigueur et à la réduction des déficits. Le plan Juppé sur les retraites et la Sécurité sociale déclenche des grèves massives dans le pays. Après un hiver "noir", la cote de popularité de Jacques Chirac remonte légèrement, à la veille de son premier anniversaire, avec 37% d''opinions favorables.
Un président sympathique. Si son action est jugée sévèrement, Jacques Chirac, comme François Hollande aujourd'hui, conserve une image positive dans l'opinion, un an après son élection. Une majorité de Français le considèrent alors "cultivé", "dynamique" et courageux".
Déjà la pédagogie. A la veille de son premier anniversaire, Jacques Chirac prend sa plume pour justifier lui-même sa politique, dans une longue tribune publiée dans le Monde. D'emblée, le chef de l'État reconnaît que, "pour beaucoup de Français, le changement espéré vient trop lentement", que "l'effort demandé apparaît trop exigeant pour certains", que "le sens et la portée des réformes entreprises" sont mal perçus. Le président réaffirme sa volonté de baisser les impôts dès 1997, à condition de réduire la dépense publique.
Comment il a vécu ce premier anniversaire. Ce 7 mai 1996, entre le Conseil des ministres et un dîner à l'Elysée en l'honneur du roi du Maroc Hassan II, Jacques Chirac s'offre une escapade éclair dans son ancien fief à Ussel, en Corrèze. Au programme, un bain de foule sous la pluie puis un déjeuner tête de veau, gigots-haricots en petit comité avec des élus locaux. L'imper beige détrempé, le président improvise un discours devant ses plus fidèles soutiens. "J'ai bien l'intention de reprendre mes habitudes et de venir régulièrement retrouver l'endroit où je puise ma joie de vivre", confie t-il.
"On va attendre Bernadette qui sort avec son parapluie" :
10 mai 1982 - MITTERRAND, UNE FÊTE SANS Y ÊTRE
Le contexte de l'époque :
• Sa cote de popularité : 54%
• Le taux de chômage : 6,9%
• La croissance : 3,2% au deuxième trimestre
• La promesse qui se fait attendre : le droit de vote des étrangers
• Le débat du moment : la dévaluation du franc
Etat de grâce. Après un an de pouvoir, François Mitterrand peut encore compter sur le soutien de 54% des Français. Une cote de popularité qui ferait aujourd'hui pâlir d’envie François Hollande et ses 74% de mécontents.
Un président réformateur. La gauche ayant la majorité absolue à l'Assemblée, nombre de promesses parmi les 110 propositions du candidat Mitterrand sont adoptées dès les premiers mois. On peut citer entre autres, l'abolition de la peine de mort, l'augmentation du SMIC et des allocations, la cinquième semaine de congés payés, la retraite à 60 ans. Au niveau économique, le tournant de la rigueur se profile. Des difficultés qui poussent le gouvernement Mauroy à décréter une première dévaluation du franc en juin 1981. La question se repose en mai 1982.
Comment il a vécu ce premier anniversaire. Ce 10 mai 1982, François Mitterrand mène une journée presque comme les autres. Après un déjeuner au siège du PS à Solférino, le président rejoint l'Elysée. Le soir, un dîner d'anniversaire est organisé avec des amis et journalistes chez Cecconi's, sur les Champs-Elysées. "Il est plutôt lointain et me semble t-il, très pressé", relate Michèle Cotta dans ses Cahiers secrets de la Ve République. "A ceux qui lui disent : 'Bon anniversaire !', François Mitterrand répond, comme s'il faisait semblant de ne pas entendre : "Mon anniversaire, c'est le 26 octobre".