Y aura-t-il une redistribution des cartes après la tuerie de Toulouse ? Le drame, puis l'identification, mardi, du jeune homme se réclamant d'Al-Qaïda, soupçonné des sept meurtres de Toulouse et Montauban ont mis la campagne présidentielle en suspens. Mais, une fois l’émotion passée, les candidats devront de nouveau battre le pavé. La campagne aura-t-elle alors changé de nature ? Y aura-t-il avant et un après Toulouse ? Europe1.fr a posé la question au politologue Gaël Sliman, directeur du pôle Opinion de l’institut BVA.
Europe1.fr : Est-ce que la campagne va changer de forme ?
Gaël Sliman : "Le ton entre les deux favoris va très certainement changer. Il serait ainsi étonnant que l’on assiste, après la tuerie de Toulouse, à de nouveaux affrontements verbaux aussi violents qu’en début de campagne. Quand nous avons sondé les Français sur leur intérêt pour la campagne, ils nous ont fait part de leur rejet pour ces joutes verbales. Après le traumatisme de Toulouse, elles leur paraîtront d’autant plus intolérables : la campagne va donc descendre de deux octaves."
"Après Toulouse, les thèmes abordés seront également différents. On imagine mal, par exemple, que Nicolas Sarkozy revient s’aventurer sur le territoire de l’immigration, de viande halal et casher. Il aura désormais une grande difficulté à aborder ces thèmes. La sécurité en revanche pourrait s’inviter dans la campagne, alors qu’elle n’était, jusqu’à présent, que la neuvième priorité des Français."
La situation donne-t-elle un avantage à Sarkozy ?
Gaël Sliman : "A moins d’un rebondissement judiciaire, oui, Nicolas Sarkozy est celui qui peut le plus bénéficier de la situation. Ponctuellement du moins."
"Jusqu’à présent, dans le cas de Nicolas Sarkozy, le candidat était plombé par le président. Il peinait à faire accepter son bilan. Avec ce qui se passe aujourd’hui, c’est l’inverse qui se produit : le président donne un coup de pouce au candidat. Mais on ignore toujours jusqu’à quel point cet effet jouera et pendant combien de temps la tuerie de Toulouse restera placée au cœur de l’actualité. Cela dépend des Français. Cela dépend surtout des médias".
Quelle attitude peuvent adopter les autres candidats ?
Gaël Sliman : "La configuration est très difficile pour les candidats qui ne sont pas en fonction. François Hollande, par exemple, ne peut se contenter que de suivre, de marquer à la culotte Nicolas Sarkozy sans chercher les polémiques. Mais il sait qu’il ne bénéficiera pas autant que le président sortant du sentiment national".
"Les autres candidats, dont certains comme Jean-Luc Mélenchon étaient sur une très bonne dynamique, ont tout intérêt à revenir à une campagne plus classique, qui leur laisse plus d’espace. La difficulté étant de siffler la fin de la récré sans être taxer d’opportunisme, voire de cynisme".
"Enfin, le cas de Marine Le Pen est un peu à part. Si le tueur avait été un sympathisant d’extrême-droite, sa campagne aurait été fortement altérée. Mais, dans ce cas de figure, la candidate frontiste va pouvoir poursuivre sur ses thèmes habituels : la peine de mort, etc. Reste qu’elle semble s’être lancée dans cette voie beaucoup trop vite, alors que les Français sont encore sous le choc de la tuerie."
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