De la "lucidité sur la gravité de la situation". C'est en ces termes que François Hollande s'est appliqué, jeudi, à asseoir sa crédibilité de candidat à l'Elysée, affirmant que toutes les mesures de son programme étaient "intégralement financées" et seraient "appliquées dans le quinquennat". Le candidat socialiste a pris le soin de baser son programme sur des prévisions de croissance pour les cinq prochaines années : 0,5% en 2012, 1,7% en 2013 et 2% au-delà jusqu'en 2017. François Hollande promet dans le même temps d'atteindre les 3% de déficit dès 2013, la limite fixée par le Pacte européen de stabilité et de croissance. Dans ces conditions, le cadre économique fixé par le candidat socialiste est-il raisonnable ? Europe1.fr fait le point.
Des prévisions "raisonnables" pour 2012-2013
Sur les prévisions de croissance pour 2012 et 2013, le candidat socialiste est nettement plus pessimiste que le gouvernement. Paris prévoit en effet une croissance à 1 % pour 2012 et à 2 % en 2013.
Mais en tablant sur 0,5% en 2012 et 1,7% en 2013, le candidat socialiste se montre légèrement plus optimiste que les prévisions de croissance des instances internationales. Le FMI a prévu une croissance de 0,2% dans l'Hexagone en 2012, alors que l'OCDE mise sur une croissance de 0,3 %. La Commission européenne table quant à elle sur 0,6% pour la France en 2012. Quant à 2013, l'OCDE et Bruxelles tablent sur 1,4% de croissance tandis que le FMI est sur du 1%.
Dans ses prévisions pour 2012 et 2013, le candidat socialiste ne fait donc pas dans l'excès. Ce que confirment les économistes interrogés par Europe1.fr. "Ça me paraît correct", estime Marc Touati (Assya Compagnie Financière). "En prévoyant 1,7% en 2013, François Hollande est plutôt raisonnable", juge également Mathieu Plane, de l'OFCE.
Rapportées au déficit, des prévisions "très optimistes"
Toutefois, l'un et l'autre mettent en garde contre les incertitudes entourant toutes ces prévisions. Car il y a plusieurs motifs de prudence. "On n'est pas indépendant des décisions politiques de nos partenaires européens", explique d'abord Mathieu Plane.
Ce dernier regrette également chez François Hollande, comme chez tous les politiques, une "pratique comptable des choses". En effet, d'après lui, si le chiffre de 1,7% avancé par le socialiste pour 2013 apparaît "raisonnable", "ça devient beaucoup moins réaliste" si on le ramène à l'objectif de déficit public de 3% affiché par François Hollande pour la même année. Partant du calcul que revenir à 3% du PIB impliquera 30 milliards d'efforts structurels, l'économiste s'interroge : "Comment peut-on avoir 1,7% en menant une politique de rigueur ?".
L'impact des politiques européennes
Que penser dans ce cas des prévisions post-2013, alors que François Hollande mise sur 2% en 2014 et au-delà jusqu'en 2017 ? "Mieux vaut être prudent", prévient Marc Touati. Depuis 10 ans, on a une croissance annuelle moyenne de 1,2% et de 0,2% depuis quatre ans", souligne-t-il.
"On peut espérer une croissance à 2%", analyse pour sa part Mathieu Plane, "mais ça s'ancre énormément dans les engagements européens", rectifie-t-il aussitôt. La France est "beaucoup plus dépendante de ces engagements que du programme économique de Hollande ou Sarkozy", rappelle l'économiste.