46 millions de Français sont appelés aux urnes dimanche pour le premier tour des élections législatives. Moins d'un mois après la prise de fonction de François Hollande, la gauche part favorite. Mais rien n'est acquis. Qu’espèrent les autres formations politiques ? Quels sont les enjeux de du scrutin ? Revue de détails.
# Remplir les caisses ou l’enjeu caché des législatives
Les législatives, c’est aussi une question d’argent. Si les "petits" partis multiplient les candidatures, c’est avant tout pour tenter de faire 1% des voix dans 50 circonscriptions en métropole, seuil d'accès à la "première fraction" du financement public pour cinq ans. "Au moins 44 partis visent le financement public", comptabilise sur son blog le journaliste Laurent de Boissieu. Pour illustrer cet aspect « caché » des législatives, rappelons que si le Parti chrétien démocrate (PCD) de Christine Boutin - qui présente 115 candidats - dépasse ce seuil des 1%, elle pourra disposer d'au moins "100.000 euros" annuels pendant toute la législature.
# Objectif "majorité absolue"pour le PS et ses alliés
L’enjeu de cette élection pour les socialistes se résume en une phrase : ils veulent être majoritaires à l’Assemblée, et si possible seuls. Pour l’heure, tous les indicateurs sont au vert : selon les sondages, la gauche est largement favorite. >> Voir les derniers sondages
Toutefois, selon une projection TNS-Sofres de vendredi, le PS et ses alliés Divers gauche (DVG) peuvent espérer emporter 243 à 285 sièges dans l’hémicycle. Un score trop court pour obtenir la majorité absolue fixée à 289 fauteuils. Le PS sera donc certainement contraint de faire l'appoint avec les députés écolos d'EELV, partie intégrante de la majorité présidentielle et à qui les socialistes ont réservé 63 circonscriptions, dont une vingtaine vraiment gagnables.
Si cela ne suffit toujours pas, le parti présidentiel sera alors contraint de négocier sur chaque mesure à l'Assemblée nationale avec les députés du Front de gauche, qui doivent décider juste après les législatives s'ils rejoignent (ou pas) le gouvernement et la majorité.
# Eviter l’implosion à l’UMP
Etre confrontée à de multiples triangulaires avec le PS et le FN pourrait coûter à l’UMP plusieurs dizaines de sièges. Un cauchemar pour le parti de Jean-François Copé et François Fillon qui craint de voir ressurgir dans l’entre-deux-tours les polémiques au sujet d'éventuelles tentations d'alliances locales FN-UMP.
Le nombre de triangulaires pourrait toutefois être revu à la baisse en raison de l’abstention - prévue autour de 40% - qui empêchera le plus souvent le FN de participer au second tour. Il faut en effet réunir 12,5% des inscrits pour se maintenir et donc autour de 20% des suffrages exprimés.
Pour l'UMP, l’autre grand enjeu de ces législatives résidera aussi dans la bataille des chefs que se livrent Jean-François Copé et François Fillon.
# En finir avec le syndrome "lendemains qui déchantent" au FN
Pour le Rassemblement bleu marine de Marine Le Pen, il s'agit d'abord d'éviter une rechute d’après-présidentielle, un syndrome que le FN avait connu en 2002 puis 2007, où après de bon score en mai, le parti frontiste n'avait pas réussi à concrétiser en juin.
L’autre objectif assumé est de semer la pagaille à l'UMP en provoquant un maximum de triangulaires au second tour qui feraient chuter la droite parlementaire, et provoquer "la recomposition de la droite" que le FN appelle de ses voeux. Ainsi selon un sondage publié vendredi, Gilbert Collard serait en mesure de faire perdre la droite dans le Gard (cliquez ici pour en savoir plus).
L’enjeu est aussi financier : avec la déroute aux législatives de 2007 (moins de 5%), le FN avait vu sa subvention annuelle passer de 4,5 à 1,8 million d'euros et ses caisses se vider.
# Maintenir un groupe parlementaire pour les communistes
Le PCF avait renoncé à présenter un candidat à la présidentielle dans l’espoir qu’une candidature commune derrière Jean-Luc Mélenchon et le Front de gauche lui permettrait de sauver leur groupe parlementaire à l’Assemblée. L’enjeu est donc toujours le même : faire élire au moins 15 députés.
# Redistribuer les cartes au centre
Côté MoDem, il s’agira surtout pour François Bayrou de sauver son siège des Pyrénées-atlantiques, où il aura pour la première fois contre lui à la fois une socialiste et un UMP. L'autre seul député sortant du MoDem, Jean Lassalle, est aussi en position inconfortable, dans le même département. L'objectif de François Bayrou de constituer un groupe centriste paraît hors d'atteinte.
Malgré les multiples zizanies en son sein, le Nouveau centre devrait maintenir son groupe à l'Assemblée (il faut 15 élus).
Enfin, le Parti radical rêve, lui, de ne plus dépendre de l'UMP. Pour ce faire, le parti de Jean-Louis Borloo présente la plupart de ses 89 candidats sous le nom d'une association de financement, "l'Union radicale du centre, des indépendants et des démocrates" (Urcid).
L'objectif ? "Toucher nos sous en direct sans passer par des tuyaux, pour la première fois depuis longtemps", indique une source de cette formation, encore traumatisée par l'épisode du printemps 2011 (l'UMP avait suspendu le versement de sa subvention d'un million d'euros au Parti radical pour peser sur ses velléités d'indépendance).