L'exemplarité affichée du président François Hollande a-t-elle franchi ses limites ? Le nouveau chef de l'État a été épinglé à deux reprises en excès de vitesse alors qu'il se rendait mercredi à Caen pour commémorer le débarquement de Normandie du 6 juin 1944.
Mais le nouveau chef de l'État est loin d'être le seul à enfreindre le code de la route. De nombreux politiques ont été surpris en excès de vitesse, notamment son prédécesseur Nicolas Sarkozy, spécialiste en la matière. Europe1.fr, fait le point sur les passe-droits de ces passagers pas comme les autres.
Que reproche-t-on à François Hollande ? Le véhicule de François Hollande, parti de Paris mercredi à 12h40, aurait roulé "pendant de nombreux kilomètres à plus de 160 km/h" alors que la vitesse était limitée à 130km, sur l'autoroute A13 le menant à Caen. C'est du moins ce que rapporte BFMTV, après avoir suivi le véhicule de François Hollande lors de son déplacement en Normandie pour les cérémonies d'anniversaire du Débarquement.
D'après la chaîne, les limitations de vitesse ont été respectées dans la capitale. Mais dès que le convoi présidentiel est arrivé dans le tunnel de la Défense, situé dans l'ouest parisien, à la limite des Hauts-de-Seine, le conducteur du véhicule de François Hollande a sérieusement accéléré. Les voitures étaient ainsi lancées à 140 km/h, contre les 70 km/h autorisés.
A l'arrivée, les reporters ont interrogé François Hollande : "Monsieur le président, est-ce que vous avez fait bonne route ?" "Très bonne route", a répondu le président. "Pas d'excès de vitesse ?", a relancé un journaliste de RTL. "Je ne sais pas. Cela a été signalé ?", a alors demandé le chef de l'État.
Comment fonctionnent les escortes politiques sur la route ? Le président, le Premier ministre et les 34 ministres du gouvernement bénéficient du Services de protection des hautes personnalités (SPHP). Les 750 fonctionnaires de police du SPHP sont chargés d'assurer la sécurité lors d'un déplacement de personnalité politique.
Une escorte comprend généralement un conducteur, un garde du corps et un véhicule suiveur qui ferme le convoi. Les véhicules conduits par les membres du SPHP sont équipés de feux de pénétration placés au milieu du tableau de bord et munis d'un gyrophare en cas d'urgence. Un logo de police est également placé sur la vitre arrière de la voiture. Ce dispositif est renforcé pour le Premier ministre et le président qui bénéficient d'un nombre de fonctionnaire plus élevé pour assurer leur sécurité.
Quels principes de sécurité justifient les excès de vitesse ? "Au volant, les fonctionnaires de police sont autorisés à faire toutes les infractions possibles sous couvert du principe de sécurité", indique Benjamin Lyonnet, journaliste à Autoplus et auteur d'une enquête sur la conduite des candidats à la présidentielle, interrogé par Europe1.fr. Les fonctionnaires de police qui escortent une personnalité politique peuvent en effet commettre plusieurs entorses au code de la route lorsqu'il s'agit d'assurer la sécurité de leur passager. "En ville, pour ne pas rester englué dans les bouchons, les conducteurs sont autorisés à rouler plus vite, à griller les feux rouges, à emprunter les voies de bus, à changer de voies rapidement etc. Tout cela se justifie quand il s'agit d'éviter des mouvements de foule ou d'évacuer rapidement un lieu", indique le journaliste spécialisé dans l'automobile.
Sauf que bien souvent, les excès de vitesse sont en fait constatés sur l'autoroute. Dans une enquête publiée en avril dernier, AutoPlus soulignait par exemple que Marine Le Pen avait été épinglée à 150km/h sur l'autoroute. François Bayrou n'est pas en reste, toujours selon le magazine, le patron du Modem circule en moyenne à 145km/h sur de longs trajets. En octobre dernier, Jean-Paul Huchon s'est quant à lui fait retirer temporairement son permis après avoir été contrôlé à 171 km/h, au lieu de 130km/h, sur l'autoroute A13. "Ces excès de vitesse sont davantage liés à une volonté de gagner du temps plutôt qu'à respecter des mesures de sécurité", commente Benjamin Lyonnet.
Les politiques, plus sages aujourd'hui ? Selon l'enquête d'AutoPlus, les candidats à l'élection présidentielle de 2012 font légèrement mieux que ceux de 2007 et 2012. "Ils ont levé le pied sur les grosses infractions qu'on relevait souvent avant comme des feux rouges grillés et des excès de vitesse", indique Philippe Zanon, rédacteur en chef adjoint du magazine AutoPlus.
Pour Benjamin Lyonnet, il s'agit d'une question de personne. "Bien souvent, ce sont des politiques de manière personnelle qui donnent la consigne à leur service de sécurité de respecter scrupuleusement le code de la route. D'autres s'en moquent", constate le journaliste à AutoPlus. Ainsi, dans le passé, Jean-Marie Le Pen, a régulièrement été épinglé pour excès de vitesse. Le président d'honneur du parti frontiste souhaitait d'ailleurs que la réglementation de vitesse sur l'autoroute soit relevée à 150km/h.
François Hollande aurait donné des consignes strictes pour que le code de la route soit respecté par les conducteurs qui l'escortent. "On peut imaginer que lors de son déplacement en Normandie il était distrait par autre chose et ne surveillait pas le tableau de bord - qui est peu visible dans une DS5 comme la sienne", souligne Benjamin Lyonnet.
Jacques Chirac, un conducteur exemplaire. "De manière personnelle, Jacques Chirac mettait un point d'honneur à ne commettre aucune infraction. Même en ville il se refusait à griller le moindre feu rouge", rapporte Benjamin Lyonnet. En 2002, l'ancien président de la République a même fait de la sécurité routière une cause nationale. "À partir du discours de Jacques Chirac, le 14 juillet 2002, la sécurité routière est devenue l'une des priorités gouvernementales. Fin 2003, des mesures ont été prises : mise en place du système de sanctions automatisé des excès de vitesse, pression plus importante des forces de l'ordre, etc.", rappelle Vincent Spenlehauer, directeur du Groupe d'analyse du risque routier et de sa gouvernance de l'Inrets, dans le journal du CNRS.
Nicolas Sarkozy, mauvais élève. Contrairement à son prédécesseur, Nicolas Sarkozyest loin d'avoir un comportement irréprochable sur la route. "Il est de loin celui qui a commis le plus d'infractions et qui a eu le plus d'accidents", rapporte le journaliste d'AutoPlus. Paradoxalement, sous le mandat de Nicolas Sarkozy le nombre de radars a été fortement multiplié et l'ancien président a réclamé en 2011 la suppression des indicateurs de radars.