Malgré la cinglante défaite de la gauche aux élections départementales, il n'y aura pas de remaniement. Du moins pas tout de suite. Pour Europe Ecologie-Les Verts, la question se pose donc avec toujours autant d'acuité : faut-il retourner dans la majorité et entrer au gouvernement ? Ou rester en dehors tant que l'exécutif n'aura pas infléchi sa politique ?
Explication mouvementée. Les tensions sur le sujet s'accroissent encore en interne. Mardi, une explication mouvementée a eu lieu à l'Assemblée nationale. Les députés EELV opposés à un retour au gouvernement ont mis en cause François de Rugy et Barbara Pompili, les coprésidents du groupe écologiste à l'Assemblée, qui ne diraient pas non à des maroquins ministériels. Tout comme Jean-Vincent Placé, le patron du groupe EELV au Sénat.
Mais ces derniers trouvent sur leur chemin Cécile Duflot. Jamais avare de critiques envers Manuel Valls, l'ancienne ministre en a rajouté une couche mardi. "Son logiciel est périmé", a-t-elle asséné dans une interview au Monde. "Il a le verbe haut, mais où sont les résultats? Ses objectifs, à savoir faire baisser le Front national, améliorer le score de la gauche et résorber le chômage, ne sont pas atteints aujourd'hui".
Duflot dénonce "une contradiction". De son côté, le Premier ministre a affirmé mardi devant l'Assemblée nationale que "la place des écologistes" était "dans la majorité" et "pleinement au gouvernement". Mais Manuel Valls l'avait assuré dimanche, dès les résultats des départementales connus : sa politique ne variera pas. Or, Cécile Duflot et ses partisans plaident depuis des mois pour un changement de cap. "On ne peut pas dire qu'on fait le rassemblement et de dire qu'on ne changera rien. C'est une contradiction", a lancé Duflot, mercredi sur BFMTV.
Le désaccord au sein d'EELV conduira-t-il à la scission du parti ? Samedi, le député écologiste Denis Baupin, favorable à une entrée au gouvernement, organise à l'Assemblée nationale une "conférence-débat" à laquelle seront présents les écologistes "hollando-compatibles". L'idée serait de poser les bases d'une fédération écologiste pro-Hollande, à laquelle seraient associées d'autres personnalités comme Jean-Luc Bennahmias ou Corinne Lepage. Une initiative raillée par le camp "autonomiste" d'EELV. "Lancer un nouveau parti dans un salon de l'Assemblée, ça donne vraiment l'image d'un mouvement populaire, issu du terrain", ironise Julien Bayou, porte-parole national d'EELV. Malgré ses critiques envers l'exécutif, Emmanuelle Cosse, la secrétaire nationale du parti, sera tout de même présente, donnant l'impression de jouer sur plusieurs tableaux. "Elle a un rôle difficile, celui de tenir la baraque", la défend Julien Bayou.
Le dilemme de Hollande. Pour François Hollande aussi, l'équation est compliquée. Laisser sur le bord de la route toute une frange des Verts serait-il vraiment une bonne opération pour le président, soucieux de rassembler une gauche fracturée en vue de la présidentielle ? Dimanche, Cécile Duflot s'est entretenue avec François Hollande dans l'avion présidentiel, de retour de la marche contre le terrorisme organisée à Tunis. Selon les informations d'Europe 1, l'ex-ministre a clairement fait savoir au président qu'une scission d'EELV ouvrirait inévitablement la voie à une candidature écologiste en 2017. Et donc à une concurrence à gauche pour le chef de l'Etat qui, face à une UMP revigorée par les départementales et à un FN en pleine ascension, n'a vraiment pas besoin de cela.
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