"Nous sommes fiers de ce que nous faisons !" C’est ce qu’a tenu à faire savoir la garde des Sceaux, Christiane Taubira, dans un discours de 40 minutes à la tribune de l’Assemblée nationale, mardi, au premier jour du débat sur le projet de loi visant à instaurer le mariage pour tous. "L’ouverture du mariage aux personnes du même sexe est un acte d’égalité. Il ne s'agit pas d'un mariage au rabais, il ne s'agit pas d'une ruse, pas d'une entourloupe, il s'agit d'un mariage avec toute sa charge symbolique, et toutes ses règles d'ordre public", a-t-elle insisté, dans un discours applaudi par tous les députés de gauche, qui se sont levés de leur banc pour l’occasion.
Tous les débats de la journée de mardi dans notre article : Mariage gay, premier round terminé
"Mensonges." "Qu'est-ce que le mariage homosexuel va enlever au mariage hétérosexuel ?" a demandé la ministre de la Justice. "Alors s'il n'enlève rien, nous allons oser poser des mots sur des sentiments et des comportements", a-t-elle renchéri, en dénonçant "les mensonges" lorsqu'il a été dit "que les mots de ‘père’ et de ‘mère’ seraient supprimés".
>> Est-ce vraiment un "mensonge" ? Les réponses dans notre article : les mots "père" et "mère" effacés du code civil ?
Un texte qui "illustre la République." "Nous parlons d'hypocrisie pour ceux qui refusent de voir ces familles homosexuelles et nous parlons d'égoïsme pour ceux qui s'imaginent qu'une institution de la République pourrait être réservée à une catégorie de citoyens", a lancé la ministre. Et de poursuivre : "nous disons que oui, le mariage ouvert aux couples de même sexe illustre bien la devise de la République : la liberté de se choisir et de vivre ensemble, l'égalité de toutes les familles."
"Nous parachevons l'égalité". "Au nom d'un prétendu droit à l'enfant, vous refusez des droits à des enfants que vous choisissez de ne pas voir", a-t-elle ajouté. "Vos objections n'ont pas de fondement sauf une réelle difficulté à inclure dans vos représentations la légitimité des couples de même sexe", a-t-elle encore taclé, prévenant : "vos enfants et vos petits-enfants les incluent déjà et vous serez bien mal à l'aise lorsqu'ils viendront voir les comptes rendus de vos débats". Rappelant l'histoire du mariage depuis l'instauration du mariage civil en 1791, la bouillante garde des Sceaux a souligné que "depuis deux siècles, l'évolution du mariage va vers l'égalité". Et de conclure : "C’est ce que nous faisons aujourd'hui, nous parachevons l'égalité."
"Du Badinter aux petits pieds." Sur Twitter et dans les couloirs de l’Assemblée, les réactions à cette longue tirade sont diverses. Dans la majorité, on la compare déjà au discours de Simone Veil sur l'avortement. Sophie Dessus, députée socialiste de Corrèze, a, elle, salué un "discours fort, noble, alliant raison et émotion. Un discours d'égalité, [lu] sans une note". "Quelle femme", a-t-elle même conclu.
Discours de @chtaubira, fort, noble, alliant raison & émotion. Discours d'égalité. Sans une note, quelle femme !#mariagepourtous#DirectAN— Sophie Dessus (@SophieDessus) January 29, 2013
"Quand on a que l'arrogance comme arme, c'est faible. C'était du Badinter aux petits pieds", a pour sa part rétorqué le chef de file des députés UMP, Christian Jacob, dans les couloirs de l'Assemblée.
>>> Sur Twitter, les internautes ont comparé le discours de Christiane Taubira à celui de Simone Veil en 1974 sur l'avortement. Les explications de Guy Birenbaum.