"C’est un point-clé. Ce n’est ni décalé, ni décoratif". Le politologue Dominique Reynié - qui dirige la Fondation pour l'innovation politique (Fondapol*), think tank proche de l'UMP -, savait que la proposition serait remarquée. Jeudi, parmi ses "12 propositions pour 2012", la Fondapol s’est prononcée en faveur du mariage homosexuel et de l'adoption par des couples de même sexe. Des idées, toutes rejetées pour l’heure par le parti de la majorité présidentielle, pourtant quasi-partenaire du think tank.
"On s’est réunis un soir, de 19 heures à minuit, pour trancher parmi nos propositions et c’est sur cette question-là que les avis étaient les plus partagés. Certains la refusaient pour des questions religieuses ou philosophiques très respectables. Moi, j’y étais attaché pour plusieurs raisons", explique à Europe1.fr, Dominique Reynié, avant de détailler les arguments de la fondation.
La Fondapol jouera les lobbyistes
"Notre société est, aujourd’hui, en plein bouleversement. Dans ce contexte, il est important de se raccrocher à la valeur 'famille'. Nous entendons, par exemple, le corps enseignant regretter la déstructuration de la famille. Or, on ne peut pas encourager les projets de famille, sans voir que les formes de la famille ont justement évolué", précise le politologue.
La Fondapol appuie également son raisonnement sur la nécessité "d’égalité entre les individus". "Que je sache, l’homosexualité n’est pas un délit. Donc si on prône l’égalité entre les citoyens, comment justifier que certains rencontrent des obstacles dans leurs projets de vie en commun", argumente encore Dominique Reynié.
L'UMP partagée sur le sujet
Si cette proposition de la Fondapol crée la surprise, c’est qu’elle intervient dans un contexte où l’UMP n’a pas encore pris de position claire sur le sujet. Une partie importante de la majorité s'oppose, en effet, au mariage homosexuel, dans le sillage notamment de la Droite populaire.
Mais les voix dissonantes sur la question ne manquent pas. Ainsi, en juin dernier, deux ministres, Alain Juppé et Roselyne Bachelot, se déclaraient favorables à "quelque chose comme un mariage" homo, tout comme six secrétaires nationaux du parti, signataires d’une tribune dans l’Express, fin novembre.
Même si la patron de l'UMP, Jean-François Copé a promis d'ouvrir le débat, on voit toutefois mal son camp se prononcer pour le mariage homo. Rappelons, par exemple, qu’avant l’été, une proposition de loi PS sur la question avait été rejetée par l’Assemblée, seuls deux députés UMP ayant voté en faveur du texte.
Le plan de bataille de la Fondapol
Mais pour la Fondapol, rien n’est encore joué pour 2012. Pour défendre cette question, le think tank a d’ailleurs l’intention de jouer les lobbyistes sur ce parti dont il est très proche. "On va tenter de les faire réfléchir. Faire réfléchir. Faire en sorte que cela bouge", promet Dominique Reynié.
"Premièrement, nous avons fait une conférence de presse aujourd’hui (jeudi, NDLR). Deuxièmement, nous enverrons notre projet à 15.000 personnes. Et après, on rencontrera les responsables politiques. Et… vous savez, les politiques sont des suiveurs", confie-t-il, persuadé que "cette proposition a encore des chances" d’être reprise dans le projet de la majorité pour 2012. "Ils voudront apparaître comme des libéraux", dit-il encore évoquant les ténors de la majorité. Mais suivront-ils vraiment ?
*Créée en 2004 par Jérôme Monod, le think tank est également présidé par Nicolas Bazire, ancien directeur de cabinet d'Edouard Balladur. Elle compte dans ses instances les UMP Charles Beigbeder et Grégoire Chertok, très proches du numéro un de l'UMP, Jean-François Copé.